Alexia Foundation : Sara Naomi Lewkowicz – 1er Prix Etudiant
Le reportage de Sara Naomi Lewkowicz est un mélange de hasard et de conviction journalistique. Intéressée par la réalité de l’après-incarcération, elle s’introduit dans la vie de Shane et Maggie au moment ou il est libéré de prison. Elle capture alors des scènes de tendresse familiale : Maggie, ses deux enfants sur les genoux, les joues roses d’émotion, échangeant un regard étincelant avec Shane ; Maggie, apprêtée à l’occasion d’une des rares soirées qu’ils s’accordent tous les deux, enlacée dans les bras tatoués de Shane, sur le point de l’embrasser fougueusement.
Ces images chavirent soudain, les deux corps se mêlent mais dans un affrontement violent, les yeux sont brulants non de désir mais de jalousie et de supplication, les bras ne se caressent plus mais s’arrachent, les bouches ouvertes hurlent, les lèvres tremblent, les yeux brillent de larmes. Le rêve a duré un temps court, suspendu, avant de s’effondrer, Shane risque 17 ans de prison et Maggie déménage en Alaska pour se rapprocher du père de ses enfants.
Le sujet a basculé, Sara Naomi Lewkowicz transforme cet incident en une étude des schémas menant toute relation abusive à l’échec, à la violence. Revenant sur les images qu’elle a prises, elle étudie son contexte, son développement, son explosion, et va dorénavant s’intéresser à ses conséquences, plus subtiles, moins spectaculaires. Il y a une spontanéité étonnante dans ses images, dans cette présence affirmée, engagée mais non intrusive, dans cette façon de documenter sans tenter de changer le cours de l’histoire immédiate. A la place elle a décidé d’agir par la photographie, en acceptant instinctivement ses limites et son potentiel.
Laurence Cornet
