Rechercher un article

Revue Fragments – Ocean Indien

Preview

 Fragments, c’est une collection photographique produite dans l’océan Indien, basée sur des résidences de création. À chaque numéro sont invités 4 photographes et un écrivain dans un lieu de l’océan Indien (une ville, un village, un quartier). Leur seule contrainte est cet espace géographique imposé. Ensuite, libre à eux de créer un création documentaire originale.
Rencontre avec son initiateur, le photographe indépendant Romain Philippon.
Cilou de Bruyn


Comment est née l’idée de cette collection de revues Fragments ?

D’une envie collective de créer un support de diffusion pour les auteurs de la zone. Nous avons d’abord pensé à la revue classique, en ayant comme modèle la revue 6mois, mais ce genre de projets était trop lourd à gérer. L’idée d’un modèle basé sur des résidences de création s’est présenté à nous, et nous semblait finalement plus adaptée à nos réalités. Nous essayons de constituer une équipe d’auteurs dont les écritures vont pouvoir coexister dans le livre. Toutes les sensibilités nous intéressent, même si le fond est principalement documentaire. À chaque numéro, quand nous le pouvons, nous invitons un photographe qui ne vit pas dans l’océan Indien, mais la revue est tout de même dédiée aux auteurs qui y résident.

Votre volonté est de vous écarter des clichés touristiques. S’agit-il d’une publication en mode « reportage », est-ce une revue engagée ?

Nous sommes loin du reportage, tout simplement car le travail en résidence est relativement long, et il force les photographes à travailler sur eux-mêmes. Le résultat est assez intime d’une certaine manière. J’espère que les photos dans chaque numéro sont bien spécifiques à chaque lieu, à chaque île. Dans les 4 premiers numéros de Fragments, on navigue entre La Réunion, Madagascar, et l’île Maurice. Chacune des ces îles est radicalement différente. Et les auteurs qui y vivent savent reconnaître leurs spécificités. C’est aussi tout l’intérêt de faire travailler des auteurs locaux. D’une certaine manière, notre revue est engagée. Déjà dans le sens où les photographes montrent ce qu’ils veulent, sans filtres. Ici, ce n’est pas forcément simple de faire ça. À Maurice par exemple, les enjeux touristiques sont très forts, et la communication visuelle est donc très vite verrouillée. On revendique donc notre part de liberté, et surtout la possibilité d’une prisme différent, à mi-chemin entre l’art et le documentaire.Fragmentsest tout sauf un atlas ou un guide sur le lieu où nous résidons. C’est un portrait, collectif et singulier, avec une subjectivité assumée.

Y a-t-il quelque chose que vous tentez de démontrer ?

Nous avons avant tout une envie forte de créer une matière photographique contemporaine, qui raconterait les enjeux de nos îles, et qui donnerait à voir un visage plus réel de notre quotidien. Nous sommes tous lassés des images de notre région qui sont diffusées dans les médias, qu’ils soient locaux ou nationaux. L’idée était donc simplement de se créer un espace de diffusion, libre et indépendant. Enfin, et évidemment, nous sommes ravis si certains photographes peuvent ainsi mieux faire connaître leur travail.

Pourquoi associer un auteur aux photographes ? 

L’auteur permet de faire le lien entre les photographes, il a donc souvent un rôle essentiel. C’est lui qui fait le pivot, et qui va aider le lecteur (et aussi le maquettiste !) à s’y retrouver. L’auteur est présent pendant toute la durée de la résidence, avec les photographes, et chacun est libre de sa méthode pour écrire, mais la plupart du temps, il navigue avec tous les photographes en fonction de leurs sujets.

Chaque numéro est dédié à un seul lieu dans lequel les photographes travaillent en résidence – ce 4° numéro à Rose-Hill. Pourquoi ?

Au départ, il s’agit plus d’un souci de logistique et de budget. La résidence nous permettait de condenser les coûts de production, et on limitait le temps de création, afin de produire un objet rapidement. Puis on s’est rendu compte que la résidence imposait des contraintes intéressantes pour tous. Les limites de temps et d’espace étaient finalement des points de réflexion intéressantes pour le travail de chacun. Les auteurs ne se connaissent généralement pas, et doivent donc composer ensemble, et apprendre à confronter leur regard avec celui des autres. C’est à chaque fois très riche en échanges. Ce qui relie les photographes, c’est souvent la rencontre avec les habitants. Les liens se tissent rapidement. Et puis il se dégage toujours une certaine tendresse vis à vis d’un lieu que l’on éprouve si intensément, à cotés de collègues qu’on ne connaissait pas en arrivant, et qui sont des amis quand on repart.

Présentez-nous Rose-Hill, pourquoi ce lieu, de quoi est-il emblématique ?

Rose-Hill n’est pas une ville côtière, donc assez peu touristique. C’est ce que nous cherchions dans cette île qui est l’une des destinations les plus prisées au monde par les vacanciers. Ensuite, nous avons eu l’opportunité d’avoir un soutien de la part de l’institut Français de Maurice, qui est situé à Rose-Hill, donc cela a scellé notre décision.

La question des rémunérations des photographes étant très présente dans l’actualité, comment cela se passe-t-il au sein de Fragments ?

Pour le projetFragments, nous prenons en charge tous les frais de résidence, y compris le transport. Ensuite, un contrat de droits d’auteur est signé à chaque numéro pour la vente des livres, même si ça reste très symbolique. Ce projet ne génère pas d’argent, et son seul objectif est de créer un cadre de liberté de création pour les auteurs, et créer des connexions qui n’auraient peut-être pas pu avoir lieu sans. Très peu d’auteurs à La Réunion vivent de leur travail artistique. Nombreux sont ceux qui sont obligés de répondre à des commandes privées (entreprises, mariages…).

Qu’est-ce qui vous touche et vous anime dans ce projet ?

L’idée du travail en collectif me réjouit. La solitude est  le seul aspect négatif de mon métier de photographe. Grâce à ce projet, je rencontre des gens formidables, et il nous permet aussi de bien se marrer, ce qui n’est pas négligeable.

Votre souhait le plus cher ?

Que les livres de photographie ne disparaissent pas.

 

Infos utiles :

Revue Fragments, Rose-Hill, volume 4, automne 2018
Avec la participation de : Karl Ahnee, Gillian Geneviève, Stéfan Grippon, Magali Paulin, Flavio Tarquinio,

104 pages couleur, 22x28cm, imprimé en France sur du papier mat,
Éditions Pendant ce temps
Prix public : 19 euros. En prévente sur Ulule jusqu’au 24 septembre,

voir : www.fragments.re

 

Merci de vous connecter ou de créer un compte pour lire la suite et accéder aux autres photos.

Installer notre WebApp sur iPhone
Installer notre WebApp sur Android