Chaque année, lors des Rencontres d’Arles, les organisateurs du Prix HSBC pour la Photographie présentent les deux monographies des lauréats de l’année à la librairie Actes Sud. Actualité riche donc puisque c’est également en ce moment, à Mougins, que se déroule la deuxième exposition du Prix HSBC pour la Photographie 2016. Sous la direction artistique de Diane Dufour, les deux lauréats Marta Zgierska et Christian Vium présentent durant tout l’été leurs travaux au Musée de la Photographie André Villers et à la Galerie Sintitulo. Cette exposition fait suite à la première présentation inaugurale qui s’est tenue à Paris à la galerie Esther Woerdehoff, avant de continuer à travers la France son itinérance qui se clôturera en décembre avec la présentation de nouvelles œuvres produites au cours de l’année, avec le soutien d’HSBC.
A cette occasion, et pour inaugurer chaque exposition, les deux photographes choisissent une photographie et nous offre un décryptage de l’image sélectionnée issue de l’exposition :
Photographie « Sans Titre (la main) » issue de la série Post de Marta Zgierska
Cette photo joue avec l’idée de performance artistique, l’image n’étant que la dernière étape de l’ensemble du processus. J’ai utilisé mon corps comme outil, en cherchant mes limites, pas vraiment de douleur, mais plutôt de peur. Le contact d’un couteau, une incision sur sa propre peau, un filet de sang sur une main deviennent des vecteurs universels de peur. Ce qui est étonnant, c’est que l’on ne frissonne même pas, car l’image est purement esthétique. L’expérience de base s’est déroulée dans des conditions de laboratoire, ce qui est paradoxal. Pour moi, cette photo dit : « Arrêtez-vous. Arrêtez-vous et regardez. » Comme de l’hypnose. On distingue un petit chemin, les lignes de la main, le chemin de la vie. On voudrait tellement qu’il soit plus épais, plus long, plus net.
Assemblage #4 de l’installation The Nomadic City par Christian Vium.
Cette image (« Assemblage #4 ») est un montage réalisé spécifiquement pour l’exposition du Musée de la photographie André Villers à Mougins. Le projet « Ville Nomade » est une expérience en cours, qui consiste à assembler à l’infini des éléments particuliers (mes photos, archives, documents inédits, cartes, articles de journaux, etc.) dans le but de créer des montages narratifs qui dépendent de l’espace où ils sont exposés. Le projet attire ainsi l’attention sur la nature construite d’une histoire, faite de fragments auxquels le montage et l’assemblage viennent donner sens.
Dans cet assemblage-ci, la toile de fond est une carte pluviométrique de la courbe du déficit de précipitations en Mauritanie, pendant les dernières années de grandes sécheresses au Sahel, au milieu des années 1980. Plusieurs images viennent ensuite s’ajouter par-dessus. À gauche, une photo récente que j’ai prise en 2014 représente une moustiquaire et un matelas, dans une chambre chichement décorée du quartier pauvre d’El Mina. En dessous, une capture d’écran extraite d’un documentaire sur la ville de Nouakchott réalisé pour le 20e anniversaire de l’indépendance, montre un groupe d’anciens nomades installés dans une baraque en bois, en banlieue de Nouakchott, suite aux premières sécheresses de la fin des années 1960 et du début des années 1970. Le portrait d’un jeune couple que l’on voit au milieu provient de l’album photo personnel d’une connaissance à Nouakchott. Il date du début des années 1990. Je trouve qu’il exprime un mélange de tendresse et de timidité. Il apporte aussi des éléments intéressants sur le style, donc sur les aspirations, et sur l’autoportrait. L’image de droite est une photo récente que j’ai prise en 2011 dans la banlieue de la ville, qui ne cesse de se développer. Cet assemblage synthétise donc l’histoire de Nouakchott par un montage du passé et du présent, en intégrant plusieurs thèmes centraux qui affectent et caractérisent cette « ville nomade ».
Chaque élément pris individuellement a sa propre signification, mais l’ensemble forme une séquence, qui intègre ce que j’appelle une « cartographie ethnographique » de la ville de Nouakchott. Chacune de mes images est géolocalisée, ce qui permet de retrouver plus tard l’endroit exact et de repérer les évolutions du paysage urbain au fil du temps. « Ville Nomade » est donc une tentative de produire une archive de la ville de Nouakchott pour les générations futures.
EXPOSITION
Prix HSBC pour la Photographie 2016
Marta Zgierska et Christian Vium
Du 24 juin au 28 août 2016
• Musée de la Photographie André Villers
Porte Sarrazine
• Galerie Sintitulo
10 rue Commandeur
06250 Mougins
France
+33 (0)9 51 51 24 50
http://www.mougins-tourisme.fr/fr/content/le-musée-de-la-photographie-andré-villers-0
http://www.galeriesintitulo.fr
http://prixhsbc.evenium.com
LIVRES
• Marta Zgierska – Post
Prix HSBC pour la photographie 2016
Actes Sud
Sortie : Juillet 2016
22,0 x 28cm / 96 pages
ISBN 978-2-330-06305-4
20€
http://www.actes-sud.fr
• Christian Vium – Ville Nomade
Prix HSBC pour la photographie 2016
Actes Sud
Sortie : Juillet 2016
22,0 x 28cm / 96 pages
ISBN 978-2-330-06304-7
20€
http://www.actes-sud.fr
