Les photographes émergents choisis cette année par le Festival de photographie de Deauville proposent une plongée dans les effets de la nuit, que cette dernière soit source de féerie ou porteuse d’une tonalité plus sombre et inquiétante.
Même en plein jour, il semble faire nuit. Les voyageurs saisis par Antoine Lecharny dans sa série « Côté fenêtre » paraissent arpenter un monde opaque, comme pris dans la mécanique d’une horlogerie infernale ou piégés dans un trajet permanent. Le photographe, né en 1995, a reçu le Grand Prix du Jury de Planches Contact, décerné chaque année à l’un des artistes en résidence, pour ce travail réalisé sur la ligne de train entre Paris et Deauville, capturant l’image des passagers, à toute heure de la journée ou de la nuit, en des tableaux particulièrement envoûtants où est figée la rudesse du mouvement.
Autres tableaux nocturnes, plus calmes et colorés, la série Home Sensations de Teo Becher s’intéresse aux maisons de Deauville. Le photographe tente de souligner l’architecture singulière de ce coin de Normandie, peut-être davantage visible dans les heures de la nuit, éclairée par les lampadaires ou par un ciel d’un bleu électrique typique d’un début de soirée. Les ombres accompagnent ces grandes demeures qui semblent dormir mieux que les habitants de la ville, fascinant ce photographe de 29 ans qui vit entre Nancy et Bruxelles, y trouvant une matière « cinématographique ».
Essai métaphorique
Une esthétique qui se retrouve aussi dans le travail d’Alisa Martynova, née en 1994 et originaire d’Orenburg en Russie. Utilisant l’atmosphère nocturne, avec des images baignées de lumières artificielles très vives, elle raconte le parcours de migrants qui viennent de différents pays du continent africains et chacun avec des trajectoires singulières, certains étant en Normandie depuis environ dix ans. Elle compose un « essai métaphorique » plutôt qu’un reportage, choisissant des touches évocatrices pour sublimer la beauté de la nuit et donner un récit en images à ces vies fortes.
La nuit est aussi la matière privilégiée de Céline Croze, née au Maroc et qui vit à Paris. Au cours d’une errance nocturne, elle tente d’ « attraper des fragments de vie » d’un monde qui « est en train de s’effondrer ». Ouverte au hasard des rencontres, elle s’intéresse aux vies qu’elle croise dans cette déambulation photographique et les sublimant en des panoramas vaporeux dont nous reconnaissons allègrement l’empreinte fantomatique.
Jean-Baptiste Gauvin
Le concours Jeunes Tremplines de Planches Contact
Lauréats du 11e édition du concours, remporté par Antoine Lecharny
Jury présidé par la photographe Sarah Moon et composé de Lionel Charrier (rédacteur en chef photo, Libération), Babeth Dijan (directrice de rédaction, Numéro), Alain Génestar (directeur, Polka Magazine), Thierry Grillet (essayiste et écrivain), Julien Guerrier (directeur des éditions Louis Vuitton), Marin Karmitz (directeur des cinémas MK2), Anne Lacoste (directrice de l’Institut de la photographie des Hauts-de-France), Philippe Augier (Maire de Deauville) et Laura Serani (directrice du festival).
Appel à candidatures pour l’édition 2022, jusqu’au 05 janvier 2022.
Informations pratiques
Festival Planches Contact de Deauville
Du 23 octobre 2021 au 2 janvier 2021
www.planchescontact.fr
Directrice: Laura Serani
Coordination, production Planches Contact : Camille Binelli
Scénographie : Bruno Moinard, Agence Moinard-Betaille
Presse : Pauline Parvan, Les Franciscaines Deauville