Dans une zone reculée du bois de Vincennes, cachés derrière le Centre Régional de Formation de la Police, deux grands bâtiments entourés de grillages et de barbelés se font face : le Centre de rétention administrative (Cra) de Vincennes a ouvert ses portes en 1995, pour répondre aux politiques d’éloignement des étrangers en situation irrégulière sur le territoire français.
Ces dernières années, environ 200 hommes en moyenne sont retenus dans les bâtiments 2A et 2B, gérés par la police. Ces hommes sont tous sans-papiers ou en situation de séjour irrégulière. Ils habitent en France parfois depuis 40 ans et ont pour la plupart fondé une famille, trouvé un emploi fixe et scolarisé leurs enfants nés français dans des écoles de l’hexagone.
Dans le Cra de Vincennes, ces personnes sont normalement enfermées pendant une durée maximale de 45 jours avant d’être renvoyées dans leur pays d’origine. Certains voient également leur séjour en Cra prolongé si le pays d’accueil refuse les retours sur son territoire.
De nombreuses tentatives de suicide ont été décomptées dans le centre. Tahir, marocain de 29 ans, a les bras couverts de cicatrices de mutilation. Début août 2022, il a de nouveau tenté de mettre fin à ses jours face à l’injustice de sa rétention. Plusieurs retenus témoignent également de la négligence de leurs blessures, généralement peu prises au sérieux et non soignées.
Avec l’ennui comme seul compagnon, les retenus souffrent d’une grande détresse. Aucune activité, cours ou promenade ne leur sont proposés, les hommes étant contraints d’errer dans leur petite chambre partagée, avec du papier toilette collé sur les fenêtres en guise de rideaux. Leur seule sortie autorisée est la cour extérieure, immense cage de grillage, avec un ballon en mousse comme unique distraction. Mis à part les visites autorisées pour les familles dans un bâtiment préfabriqué utilisé comme parloir, aucun public n’est habilité à entrer dans le lieu. D’ailleurs, les conditions de vie insalubres du centre entraînent un mal-être important chez les retenus. Certains racontent qu’ils auraient même préféré être incarcérés en prison, là où “au moins, on les traiterait comme des humains et pas des animaux”.
Pauline Gauer
https://paulinegauer.com/
https://www.instagram.com/paulinegauer/