Le Jeu de Paume rend hommage à l’artiste portugaise Helena Almeida, grande figure de l’art conceptuel encore méconnue en France, pour qui le corps est le vecteur d’enjeux et d’interrogations d’une pratique décloisonnée où la photographie prend une place majeure.
L’être et le faire, l’artiste et le modèle, le masculin, le féminin, Helena Alemeida endosse avec intransigeance ces points de friction pour, dans un premier lieu, dépasser les limites de la peinture et s’en affranchir, à la conquête d’un espace tridimensionnel.
Vers le milieu des années 70, elle intègre dans ses compositions performatives photographiées des éléments de son atelier, alors que la photographie était encore considérée comme un medium secondaire, comme le souligne João Ribas, co-commissaire de l’exposition et directeur adjoint du musée de Serralves à Porto où cette rétrospective a déjà été montrée. Dans une posture féministe (même si elle s’en défend) son corps fragmenté, défiguré ou même bâillonné, incarne alors un état intérieur, une charge émotionnelle qui se voit renforcée à travers les séries « Ecoute-moi » « Sens-moi » »Regarde moi ». Métaphoriques et poétiques, ces actions, soigneusement et longuement scénographiées sont un condensé d’une grande profondeur et cohérence. Vêtue de noir comme c’est la tradition dans son pays, l’artiste poursuit son exploration du désir et de l’intériorité et c’est ce qui la distingue d’autres artistes femmes comme Cindy Sherman qui ont recours à l’autoportrait dans des mises en scène sophistiquées. Avec Helena Almeida c’est toujours une vraie économie de moyens, de gestes et de mots qui est recherchée au service de l’exploration de l’image.
Entre l’instant fugace de la prise de vue et l’esquisse préparatoire précise, le registre de la présence est convoqué chez le spectateur. Sa série récente « Séduire » dans ses poses maladroites traduit la complexité du processus créatif mais aussi la mise en danger que représente ce sentiment. Dépassant les limites d’un medium à un autre (de la peinture à la photographie, à la video, et enfin au dessin et à la chorégraphie ) elle occupe tout l’espace dans ces rituels immortalisés par son mari l’architecte Artur Rosa. Subtile entremêlement, remarquablement servi par cette première rétrospective en France d’une artiste dont le « Corpus » fascine, intrigue et ne s’achève jamais.
Exposition co-produite par le Museu de Arte Contemporanea de Serralves à Porto, le Jeu de Paume Paris et le WIELS à Bruxelles.
EXPOSITION
Helena Almeida, Corpus
Dans le cadre du « Printemps culturel portugais à Paris » organisé par la Fondation Calouste Gulbenkian, le Jeu de Paume, la Cité de l’Architecture, le Grand Palais et le Théâtre de la Ville.
Du 9 février au 22 mai 2016
Jeu de Paume Paris
1 place de la Concorde
75008 Paris
France
http://www.jeudepaume.org