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Ottawa: Margaret Watkins–Symphonies domestiques

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Les photographies de Margaret Watkins sonnent comme les refrains d’une chanson romantique. Elles se regardent avec délicatesse et incitent au souvenir. Elles sont comme les fleurs rares que l’on s’abstient de cueillir. Vouloir les toucher ou les posséder porterait presque atteinte à leur pureté, mieux vaut rester à distance et profiter du simple plaisir de les admirer.

C’est l’indissociable lien que Watkins voyait entre la musique et la photographie qui l’a poussée à réaliser les 95 élégantes œuvres aujourd’hui exposées dans une rétrospective au Musée des beaux-arts canadien. En 1923, à la demande d’un magazine qui préparait un portrait d’elle, la photographe résuma d’ailleurs sa vie en ces quelques mots : « Née à Hamilton, en Ontario, nourrie de musique et d’images. » Margaret Watkins n’est pourtant restée qu’une partie de sa vie au Canada, émigrant à l’âge de 24 ans à Boston puis à New York, où la vie culturelle intense lui fait assouvir sa passion pour de nombreux concerts ou opéras.

Dans la mégapole américaine, elle décroche un emploi d’assistante chez Alice Boughton, une portraitiste qui gagnera par la suite une certaine réputation. A côté, elle suit les cours de l’influent Clarence H. White, qui lui fait découvrir les secrets du medium, du pictorialisme et du modernisme, et lui fait rencontrer d’autres gloires telles que Alfred Stieglitz ou Paul Strand. Découvrant le talent de la jeune canadienne, White l’embauche même plus tard comme enseignante.

Naturellement, elle entame sa carrière par le portrait avant de bifurquer vers la nature morte et le paysage. Elle connaît un premier succès avec Opus 1, en 1914, une épreuve qui immortalise trois bateaux de pêche autour d’un triangle d’eau. Mais son image la plus connue reste Symphonie Domestique (le titre de l’exposition d’aujourd’hui), composition gracieuse qui met en scène trois œufs sur un égouttoir en émail et dont les courbes convoitent les ellipses d’une mélodie. Imprégnée de l’esthétique pictorialiste, toutes ses photographies s’intéressent à des sujets littéraires et parfois sentimentaux, leurs atmosphères étant résolument chimériques. Elle les réalise dans sa cuisine, dans la rue et en s’inspirant du quotidien.

On dit également de Margaret Watkins qu’elle aimait repousser les frontières de l’acceptable, tant dans le choix des thèmes que dans le degré d’abstraction. Ses représentations d’objets du quotidien ont posé de nouveaux jalons dans la nature morte photographique et elle sera l’une des premières à mettre aussi son art au service de la publicité, notamment à New York. Après la mort de son mentor Clarence White, elle décide d’entreprendre un voyage en Europe, dont elle ne reviendra jamais et produit d’innombrables photographies, dont beaucoup sont aujourd’hui encore introuvables. Fortes d’une élégance associée au noir et blanc, ses photographies reposent sur une harmonie de composition et la sensibilité d’un regard tendre. Un regard qui mériterait d’avantage de reconnaissance.

Jonas Cuénin

Margaret Watkins, Symphonies domestiques
Jusqu’au 6 janvier 2013
Musée des beaux-arts du Canada
380 Sussex Drive  Ottawa
ON K1N 9N4, Canada

(613) 990-1985

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