Par Arnaud Adida (A.galerie Paris)
Nick Brandt is back ! Il récidive, repart au combat, toujours et encore, depuis 20 ans. Armé de son appareil moyen format, il mène sa guerre écolo contre les braconniers et ceux qui tuent les animaux. Cette lutte, il la mène avec son art et avec sa fondation : Big Life Foundation.
Il ne lâche rien dans ce combat, il revient au premier plan, avec toujours autant de créativité mais aujourd’hui avec une belle prise de risque puisqu’il quitte son noir & blanc légèrement sépia et s’engage vers la couleur. Un « statement » qui l’amène encore plus près de la réalité alors qu’il crée des images impossibles.
Sa grande trilogie de 2001 à 2012 « On This Earth» – « A Shadow Falls» – « On The Ravaged Land» l’a fait connaitre mondialement (NDLR : les 3 titres peuvent et doivent se lire à la suite !). On y voyait la grande beauté de la faune d’Afrique de l’Est, mais aussi l’arrivée de nuages sombres sur l’écosystème africain, signe de la disparition exponentielle des lions, éléphants et autres girafes.
La deuxième série « Inherit The Dust», à la limite du land art, était un exploit technique et photographique. Il installait in situdes des tirages gigantesques (plus de 5m de haut…) représentants les animaux. Cela permettait aux bêtes sauvages de reprendre possession de leur territoire, leur environnement d’origine colonisé et détruit par l’homme. Magique, magnifique, mais d’une dureté extrême.
Pour sa troisième série « This Empty World», Nick Brandt va encore plus loin. Épaulé par une production digne d’un studio hollywoodien, il réussit à faire se côtoyer les hommes & les bêtes mais cette fois les animaux ne sont pas présents sur d’immenses tirages, ils sont là, en vrai. Ce travail, pour la première fois en numérique et en couleur, nous montre à la fois la possibilité et l’impossibilité pour l’animal de vivre avec l’homme.
Ce « Monde Vide » selon Brandt, aborde la destruction vertigineuse de la nature par les mains de l’homme, montrant un monde où, submergé par le développement incontrôlé, il n’y a plus d’espace pour la survie des animaux. Les personnes sur les photos sont souvent entraînées, impuissantes, par la vague incessante du « progrès ».
Chaque image est une combinaison de deux moments dans le temps, capturés à des semaines d’intervalle, à partir de la même position verrouillée de l’appareil photographique.
Au départ, une première partie du décor est construite et éclairée (chantiers de construction, ponts et autoroutes, station d’essence, station de bus, etc.). Les semaines, voire les mois suivants, les animaux qui habitent la région deviennent assez à l’aise pour entrer dans le cadre.
Une fois les animaux capturés dans l’appareil de Nick Brandt, l’ensemble des décors est finalisé par l’équipe artistique. Une seconde séquence est alors photographiée avec l’ensemble complet et les personnages issus des communautés locales.
Les impressions finales à grande échelle sont un composite des deux éléments : la prise de vue avec les animaux + la prise de vue avec les hommes.
Nous savons que les animaux d’Afrique sont assassinés par des chasseurs avides de peaux, d’ivoire ou de sang. Mais ils sont aussi exterminés par les populations humaines toujours plus nombreuses qui accaparent leur espace vital. Le message de Brandt a été le même depuis 20 ans : arrêtons le massacre. En nous montrant la beauté des animaux, puis les ravages de l’homme sur leur habitat et enfin les regards vides des humains confrontés aux bêtes, il n’a de cesse que d’essayer d’éveiller les consciences. Aujourd’hui, elles le sont ! Il faut agir maintenant.
Plus la population humaine augmente, plus ses besoins en ressources naturelles grandissent. En pillant ces ressources, l’homme détruit son propre habitat et celui des animaux. Il est temps d’agir pour faire baisser cette population.
Note 1: les images ont toutes été photographiées sur des terres de la communauté Massai locale, sans statut de réserve protégée, près du parc national d’Amboseli au Kenya.
Note 2 : Une fois les décors retirés et tous leurs éléments recyclés sans pratiquement aucune perte, il ne reste aucune trace du tournage dans le paysage.
Arnaud Adida
Exposition
Nick Brandt: This Empty World
7 fevrier– 7 mars 2019
Presented by Waddington Custot en association avec Atlas Gallery
Waddington Custot gallery
11 Cork Street, London W1S 3LT
http://www.waddingtoncustot.com
Livre
Nick Brandt: This Empty World
Comprend des reproductions de la série et de nouveaux essais par l’artiste.
Publié par Thames & Hudson (February 2019)