Georges Rousse, ce cambrioleur.
Comme lui, il commence toujours par des repérages, il déambule à la recherche de bâtiments qu’il pourrait investir. Ensuite il dessine des plans, et envisage une méthode d’action ; Georges Rousse est un cambrioleur.
Un des derniers endroits qu’il ait visité est le musée Ingres-Bourdelle de Montauban. Profitant de la réouverture de l’institution, à la suite de sa rénovation, et de la sollicitation de sa directrice Florence Viguier-Dutheil, l’artiste a jeté son dévolu sur la majestueuse salle du Prince Noir.
Quand les idées surgissent, il décide de s’introduire par les fissures des lieux, et vient les habiter. Il trouve les failles dans les espaces et s’approprie leurs histoires au travers de liens géométriques ou lumineux. Il cherche la confrontation, mais sans effraction.
« Le blanc doit être réservé pour ces occasions de lumière, pour ces éclats qui déterminent l’effet du tableau. »
Cette citation de Jean-Auguste-Dominique Ingres, Georges Rousse pourrait la faire sienne, tant elle semble avoir été écrite pour son installation éphémère montalbanaise.
Située dans les sous-sols, quand on entre par les salles d’expositions, c’est au bout d’un long escalier que l’on croirait mener à des catacombes, que son œuvre surgit.
Dominées par les voutes monumentales, les parois décrépites de la salle répondent aux à-plats géométriques, bien reconnaissables désormais, du plasticien.
Le moment qui existe entre son arrivée et son départ relève d’une méditation contemplative et les lieux se retrouvent, eux, réinvestis, redessinés sans même en avoir été transformés.
Tout comme la lumière du jour qui l’anime, l’œuvre disparaitra à son tour, au terme de l’exposition. En accord avec les conservateurs du musée, Georges Rousse a déposé sa peinture grâce à un support amovible. On retrouvera parfois des signes de son passage, des aquarelles de prévisualisations de son travail, une photographie prise par lui-même, ou, par tout visiteur qui se positionnera à la bonne place pour se voir révéler l’évidence de cet espace. Mais sinon, il repartira sans laisser de traces. La salle du Prince Noir du musée Ingres-Bourdelle sera alors aux mains d’un nouvel artiste-cambrioleur.
Jean-Jacques Ader
Georges Rousse, Espace, Couleur, Epiphanie au musée Ingres-Bourdelle de Montauban, jusqu’à Juin 2022