M77 présente Charlotte Perriand. The Avant-Garde is Female (L’avant-garde est féminine), une exposition organisée par Enrica Viganò et réalisée en collaboration avec les Archives Charlotte Perriand, Admira et Cassina.
Le projet d’exposition se propose de mettre en lumière la production riche et polyvalente de Charlotte Perriand, célèbre dessinatrice et photographe française, collaboratrice et amie de Le Corbusier et d’autres grands noms de son époque, mettant en dialogue sa production photographique des années 1930 avec une sélection des meubles emblématiques produits exclusivement par Cassina.
Charlotte Perriand était une figure complexe et éclectique, une femme dont le chemin a traversé tout le XXe siècle avec beaucoup d’élan et de curiosité, vivant pleinement l’avènement de la culture industrielle et donc de la modernité. Enfant de l’avant-garde de son temps, elle s’est démarquée par son intelligence pointue, son anticonformisme et l’originalité de sa pensée.
Pionnière du modernisme, elle expérimente une grande pluralité de langages (architecture, design, urbanisme, photographie, politique et droits civiques), dépassant les conventions et ouvrant son esprit à de nouvelles façons d’aborder la vie, la forme et l’espace. Voyageuse infatigable, elle a beaucoup travaillé en Extrême-Orient, transformant sa rencontre avec une autre culture en une opportunité de développer sa propre créativité, d’apprendre de nouvelles façons d’imaginer, de concevoir et – un peu en avance sur son temps – d’ouvrir la voie au multiculturalisme.
L’exposition qui se tient dans les espaces du M77 est découpée en espaces thématiques, visant à offrir une reconnaissance précise des principaux aspects caractérisant le travail et la sensibilité de Charlotte Perriand.
La première partie de l’exposition présente une sélection de photographies consacrées à la montagne, milieu cher à l’artiste et source d’inspiration, dont un portrait grandeur nature de Perriand elle-même en tenue de ski. Suivent deux portraits de ses amis les plus célèbres, Le Corbusier et Fernand Léger, de part et d’autre de l’imposant Parthénon, réalisés lors de son voyage à Athènes pour une convention d’architecture en 1933. L’exposition se poursuit avec la série qu’elle a intitulée Art Brut ( sans rapport avec le courant de l’art portant le même nom aujourd’hui), dans lequel nombre d’objets-trouvés naturels, souvent rencontrés par hasard sur les plages normandes, sont photographiés avec une approche de nature morte, émergeant sous le regard de l’artiste comme de véritables œuvres d’art . La vue d’ensemble au niveau du rez-de-chaussée s’achève sur deux grandes photographies d’un bloc de glace que Perriand transforme en symbole et en métaphore, le soulevant entre ses mains ; au milieu se trouve le portrait emblématique de Perriand torse nu dans une pose victorieuse sur un sommet des montagnes de Savoie.
Le premier étage clôture le parcours avec une sélection de paysages marins (bateaux, filets et scènes de plage) et urbains (le métro, divers aperçus de la vie quotidienne) capturés en Croatie, en Angleterre, à Paris et au Japon. Des clichés partout, notés comme des notes visuelles avec lesquelles nourrir sa créativité tout azimut. En effet, les formes des objets et des structures serviront de source d’inspiration pour les formes de son mobilier et de son architecture.
L’exposition présente également au public italien pour la première fois Créer l’habitat au XXe siècle, un film documentaire de Jacques Barsac (écrivain, réalisateur et époux de sa fille Pernette). La vidéo a été réalisée en 1985 avec la participation de Charlotte, alors âgée de quatre-vingts ans, qui retrace en cinquante-sept minutes son parcours, sa vie, ses combats et ses exploits. Le film présente un grand nombre de documents d’époque, d’images d’archives, de dessins, de plans, de mobilier et de photographies, ainsi que d’autres matériaux qui aident à contextualiser l’histoire exceptionnelle d’une femme exceptionnelle.
Charlotte Perriand est née à Paris le 24 octobre 1903.
Elle étudie à l’Union Centrale des Arts Décoratifs (UCAD) à Paris entre 1921 et 1925. À l’âge de vingt ans, elle décide de devenir architecte : un métier considéré à l’époque comme un domaine exclusivement masculin. Après l’obtention d’un diplôme d’architecte d’intérieur en 1925, elle suit les recherches poétiques du Bauhaus, rejetant les canons décoratifs traditionnels et adoptant l’utilisation de nouveaux matériaux industriels.
En 1927, elle commence à travailler avec les architectes Le Corbusier et Pierre Jeanneret au célèbre atelier du 35 rue de Sèvres à Paris. C’est à cette période qu’elle commence son intense production photographique. En 1928, avec Herbst, Bourgeois, Fouquet, Sandoz et Puiforcat, elle forme le groupe d’avant-garde « L’unité de choc », avec lequel elle expose sa Salle à manger : conçue en 1927 au Salon des Artistes Décorateurs. Deux ans plus tard, suivie de son groupe d’avant-garde, elle fonde l’UAM (Union des Artistes Modernes). En 1930, elle rencontre Walter Gropius et Fernand Léger, avec lesquels elle noue une étroite relation d’amitié et de collaboration artistique.
Sa conception de l’habitat a toujours été caractérisée par la nécessité de combiner ses connaissances techniques et scientifiques des matériaux en rapport avec l’espace et la manière de l’occuper et de le vivre. En 1932, elle abandonne son atelier de la place Saint Sulpice et s’installe à Montparnasse. Entre 1933 et 1937, elle poursuit ses recherches sur la photographie expérimentale, avec les séries Art Brut et Objets Trouvés, qu’elle réalise aussi bien in situ que dans son atelier. Dans la même période, pendant la guerre civile espagnole, elle participe à des manifestations aux côtés des républicains, participe aux cercles intellectuels du parti communiste, où elle rencontre Juan Mirò, Pablo Picasso, André Malraux, Léger lui-même et Blaise Cendrars.
Après une collaboration de dix ans avec Le Corbusier et Pierre Jeanneret, avec lesquels elle signe son nom sur divers meubles majeurs, elle quitte l’atelier en mars 1937. En 1940, elle est invitée par le gouvernement japonais comme consultante pour la production nationale du dessin industriel. L’expérience au Japon a grandement influencé sa façon de penser et sa façon de travailler ; Perriand cherche ainsi à appliquer de nouvelles formes industrielles aux traditions nationales japonaises. En 1943, elle s’installe en Indochine, et en mai de la même année, elle épouse Jacques Martin, avec qui elle a une fille, Pernette, aujourd’hui responsable des Archives Charlotte Perriand.
Elle revient à Paris en 1946, et en 1951, elle dirige la délégation française à la neuvième Triennale de Milan, intitulée « Mobilier et Décoration ». Le mobilier conçu par Le Corbusier–Jeanneret–Perriand est ensuite réédité en 1964 par la société italienne Cassina.
Entre 1996 et 1999, elle a organisé trois rétrospectives de son propre travail : Charlotte Perriand Modernist Pioneer au Design Museum de Londres ; Charlotte Perriand Pioneer 20th Century au Living Design Center Ozone à Tokyo et Une connivence Charlotte Perriand–Fernand Léger au Musée National Fernand Léger.
En 2005, une exposition anthologique de son travail a eu lieu au Centre Pompidou à Paris ; en 2010, l’exposition Charlotte Perriand. Designer, Photographer, Activist a eu lieu au Museum für Gestaltung de Zurich; en 2011, Charlotte Perriand, de la photographie au design est mise en scène au Petit Palais à Paris ; et enfin en 2012, Charlotte Perriand, la photographie pour un autre monde a ouvert ses portes au Musée Nicéphore Niépce à Chalon sur Saône, France. En 2011 sort le catalogue Charlotte Perriand et la Photographie, édité par 5 Continents.
Elle est décédée le 27 octobre 1999 à Paris.
Charlotte Perriand. L’Avant-Garde is Female Exposition ouverte au public jusqu’au dimanche 25 septembre 2022.
organisée par Enrica Viganò
Charlotte Perriand : The Avant-Garde is Female
Jusqu’au 25 septembre 2022
Galerie M77
Via Mecenate 77 Milan, Italie
www.m77gallery.com
