Rechercher un article

lille3000/Utopia : Helio : Yutaka Takahashi : Mantis Religiosa

Preview

Il y a parfois des moments surprenants comme celui hier où nous avons reçu ces images de Yutaka Takahashi : Mantis Religiosa.
Cette exposition est présentée par Helio dans le cadre de lille3000/Utopia. Évènement culturel qui a pour thème la relation entre le vivant et la nature.
Elle est visible jusqu au 13 août 2022 à la galerie Nadar de la médiathèque André Malraux de Tourcoing.
Elle est accompagnée de ce texte étonnant du photographe :

Je me nomme Yutaka Takahashi, je suis photographe. Je suis marié et j’ai trois enfants : une fille et deux jumeaux pleins de vie. Je suis à la fois pompier et ambulancier, j’interviens sur les incendies ainsi que sur les premiers secours d’urgence.

La plupart de mes photos sont prises et développées lors de mes jours de repos. Je prends surtout des photos de mantes bien sûr, mais aussi de ma ville et de la nature environnante ainsi que de ma famille. J’exerce un métier qui consiste à sauver des vies, à intervenir dans la vie des gens, mais lorsque je prends des photos, il est rare que j’interfère dans le sujet ou la scène photographiée.

C’est parce que je ressens intensément avec mon cœur la nature même des mantes, qu’il m’est facile de pouvoir projeter cette image ressentie dans ce que je vais photographier. L’image naît d’abord dans mon cœur avant d’apparaître dans mon viseur. Pour moi, la mante est un sujet de photographie à part.

POURQUOI LES MANTES RELIGIEUSES ?

En vérité, même moi je ne le sais pas vraiment.
Depuis que je suis enfant, j’aime les êtres vivants. Et pourtant, même en disant cela, je n’ai pas le souvenir d’avoir beaucoup aimé les mantes à cette époque-là.
Et quand je dis mantes, c’est l’image de la femelle qui mange le mâle qui ressort, et il se peut pourtant que je ne les ai jamais regardées que comme des méchantes.

Depuis mes débuts dans la photographie, il m’est arrivé maintes et maintes fois de prendre des photos de mantes, d’abord d’une façon probablement assez vague. Le déclic remonte à peu près à cinq ans, à la saison où l’on frissonne véritablement si on ne met pas un blouson épais sur une chemise à manches longues.

Un matin, au réveil, le monde était embué de rosée matinale.
Une mante femelle était agrippée au mur de la maison.
« Voici un bon sujet ! » ai-je pensé.
Et d’emblée l’appareil a parfaitement capté les pseudo-pupilles de l’insecte.
Quand j’y repense aujourd’hui, je me dis que je n’ai peut-être pas rencontré ses yeux.
Cependant, j’ai dû être fasciné par la force du regard de la mante, et sans m’en rendre compte, j’ai appuyé avec enthousiasme sur le déclencheur.
Et c’est à ce moment-là que je suis devenu fou d’elle.
La chercher et la trouver ont alors donné lieu à une succession de jours heureux.
Ces jours se poursuivirent pendant environ deux semaines jusqu’à ce qu’un matin, le monde se couvrit d’une givre matinale toute blanche.
Pensant qu’elle en avait sans doute fini avec la vie, et à moitié résigné, je la cherchai.
Sur le mur bien exposé au soleil… personne.
Sous l’auvent du toit… personne.
Dans le pot de fleurs à l’entrée… elle était là.
Mais, le mouvement de ses membres était terriblement lent, il était évident qu’elle n’en n’avait plus pour longtemps à vivre.
Ce jour-là, en fin d’après-midi, son existence s’est terminée et ses pinces ne bougèrent plus jamais.
Pourquoi ? Pourquoi les mantes ?
Décidément je n’ai pas de réponse claire.
Simplement, voyant cet être vivant facilement détesté lutter ainsi pour vivre, je ne peux m’empêcher de le chérir, et je voudrais que d’autres personnes puissent le découvrir comme moi à leur naissance, à leur arrivée dans ce monde…
Les oothèques, sorte de berceaux souples laissés par les mantes, ne perdent pas leur couleur même quand ils sont exposés au vent froid.
Je suis là respirant l’atmosphère glacée. Tout est blanc. J’attends avec impatience la saison du soleil et des nouvelles pousses.
Et je prie pour que de nouvelles vies puissent éclore, enveloppées par la gentillesse de leur mère et pourtant exposées à la rudesse de la nature.

Yutaka Takahashi, Janvier 2020

Galerie Nadar – Médiathèque André Malraux
56 rue Famelart 59200 Tourcoing

Merci à Olivier Desrousseaux

[email protected]

Merci de vous connecter ou de créer un compte pour lire la suite et accéder aux autres photos.

Installer notre WebApp sur iPhone
Installer notre WebApp sur Android