Dans le cadre de l’année France-Brésil, Les Franciscaines de Deauville accueille l’œuvre de Sebastião Salgado, l’une des plus grandes figures de la photographie contemporaine. Réalisée à partir de la collection de la Maison Européenne de la Photographie (MEP), cette rétrospective inédite nous plonge avec émotion dans le passé du photographe, qui raconte lui-même avoir eu « le privilège énorme » d’explorer le monde durant plus de 35 ans.
« Sebastião Salgado, c’est un regard, mais c’est également une vision. Celle d’un militant. Au-delà de leur beauté, ses œuvres se distinguent par leur dimension humaine et leur réflexion profonde sur les bouleversements sociaux et économiques qui ont transformé le monde au XXe siècle », introduit Philippe Augier, maire de Deauville et Président des Franciscaines.
Ancien économiste brésilien naturalisé français, Sebastião Salgado se met à voyager à partir de 1973 pour témoigner et saisir à travers son objectif ce qui l’intéresse au plus profond de lui-même : la vie. Une photographie sociale basée sur une riche recherche documentaire, aidée par son épouse Lélia Wanick Salgado, sa partenaire de travail depuis le premier jour.
L’exposition débute ainsi avec l’un de ses premiers projets personnels, Autres Amériques (1977-1984), au cours duquel le photographe explore l’âme de l’Amérique Latine, son continent d’origine. C’est également là qu’il forge son style mêlant perfection de la composition et maîtrise du noir et blanc.
L’exposition se poursuit ensuite avec de larges extraits de ses deux plus grandes fresques photographiques : La Main de l’Homme (1986-1992) et Exodes (1994-1999). Pour la première, Sebastião Salgado se rend dans 35 pays à la recherche d’industries en voie de disparition employant encore des travailleurs manuels. La deuxième l’entraîne au cœur des vastes mouvements de populations : l’exode rural, l’immigration économique mais surtout les réfugiés fuyant les conflits les plus terribles. 5 années qui le marqueront au fer rouge, jusqu’à un point de non retour : le génocide au Rwanda dans lequel Sebastião Salgado raconte avoir été complètement « plongé » en 1994. L’accumulation de morts et de violence achèvera de faire sombrer le photographe dans une période de désespoir. « Le photographe, s’il n’est pas là, n’a pas l’image. On s’expose beaucoup ».
À cette époque, Sebastião Salgado décide pour se soigner de poser son appareil photo et de rentrer au Brésil, renouer avec ses origines. Avec Lélia, ils créent en 1998 l’Instituto Terra et se lancent à corps perdu dans un projet d’envergure : la reforestation des terres qui encerclent la ferme de son enfance et plus largement la vallée brésilienne du Rio Doce. Plus de 25 ans plus tard, leur programme écologique est l’un des plus importants du pays, avec 3 400 000 arbres plantés et 1 350 personnes investies. Un élan de vie qui redonne à Sebastião Salgado l’envie de photographier, non plus les tourments de l’humanité, mais la beauté de la faune et la flore qui peuplent notre planète. Il entreprend alors au début des années 2000 un nouveau projet intitulé Genesis (2004-2012) pour lequel il explore les confins du monde, des Galápagos à l’Amazonie, en passant par l’Afrique et l’Arctique.
Le parcours de l’exposition s’achève ainsi avec une ode aux dernières régions primitives de notre planète, où la nature règne encore dans toute sa majesté, loin de la folie des hommes. « Nous avons détruit une bonne partie de notre biodiversité, mais 46% de notre planète, soit près de la moitié, vie encore au temps de la Genèse », nous rappelle Sebastião Salgado, l’œil brillant. « Si on disparaît et on va disparaître, parce que nous sommes programmés pour finir, la planète va se reconstituer complètement. La planète a une sagesse colossale. Je ne suis pas croyant mais je crois en l’Évolution. »
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