Rechercher un article

Les 20 ans du prix HSBC pour la photographie : Yoshiko Murakami, lauréate 1999

Preview

Pour la quatrième édition du prix HSCB pour la photographie (à l’époque appelé le prix de la Fondation CCF pour la photographie), c’est Alain Mingam, alors ex-rédacteur en chef photo chez Sygma, Gamma et Le Figaro, qui est nommé conseiller artistique. Deux femmes photographes remportent le prix en cette année 1999 : Catherine Gfeller et Yoshiko Murakami, respectivement suisse et japonaise. Aujourd’hui, pour ce nouvel épisode, nous avons interviewé Yoshiko Murakami sur son expérience vécue lors de sa nomination pour sa formidable série en noir et blanc, Les mains pour voir. Avec ce travail, Yoshiko vous plonge au centre d’un monde clos où la vue n’existe plus.

Dans le cadre de la rétrospective des 20 ans du prix HSBC pour la photographie, L’Œil de la Photographie vous présente chaque semaine 2 épisodes et vous fait ainsi découvrir ce que sont devenus les lauréats qui ont écrit l’histoire de ce prix.

L’Œil de la Photographie : Le prix HSBC pour la photographie fête ses 20 ans. Il est remis chaque année à deux artistes pour les aider à développer un projet et fait l’objet d’une exposition et d’une monographie, souvent la première. Comment avez-vous vécu cette expérience ?
Yoshiko Murakami : J’ai reçu le Pprix avec le projet que j’ai présenté pour la fin de mes études à l’ENSAD, où j’étais encore étudiante à l’époque. Le prix m’a ouvert beaucoup de portes et m’a accompagnée dans le début de mon parcours d’artiste : la première monographie, l’exposition qui voyageait en France et ailleurs, des interviews dans la presse, des débats en public… C’était une expérience humaine et merveilleuse !

LODLP : Pouvez-vous nous parler du projet qui a été récompensé ? Le prix a-t-il eu une influence sur votre création depuis ?
Y.M. : Les mains pour voir était un projet sur la vision de non-voyants. J’ai voulu comprendre comment les aveugles percevaient le monde.
J’ai accompagné et photographié pendant quatre ans (1996-2000) deux groupes d’aveugles : le premier était une troupe du théâtre de jeunes non-voyants et malvoyants. Le second était un groupe de randonnée organisé par l’association Valentin Haüy pour les aveugles.
Sans la vue, il est nécessaire de faire appel à tous les autres sens pour connaître son environnement : toucher, sentir, écouter… Ainsi, les aveugles voient autrement. Ils ont leur propre vision qui ne dépend pas de la vue. Mais quelle vision ? Là, il reste toujours un mystère pour les voyants. En gravant le texte en braille sur l’image, j’ai voulu évoquer l’existence de ces deux perceptions différentes et parallèles. L’image et le texte en braille sont superposés sur la même surface, mais ils ne se croisent pas. Le texte en braille reste une énigme pour les voyants qui ne savent pas le déchiffrer, de même qu’est invisible l’image pour les aveugles. Les textes en braille étaient des poésies inspirées de chaque image.

LODLP : Outre la publication d’une première monographie, quel impact le prix a-t-il eu sur votre carrière ? Aujourd’hui encore, quels sont vos rapports avec HSBC ?
Y. M. : Le prix HSBC m’a offert plusieurs expériences : des commandes d’illustrations ou de créations (de création d’une série pour HSBC Private Banks sur le thème des inventeurs, entre autre), un séjour dans un centre d’art à New York, ainsi que des occasions de projets divers.
Personnellement, je ne produis plus beaucoup de photographie en ce moment. En revanche, je me suis mise à la calligraphie japonaise (retour aux sources ?) et au dessin. J’essaie ainsi de trouver de nouveaux moyens d’expression, plus adaptés à mes envies actuelles.
Mon projet Tracing my Heart est un journal intime en images qui reste inachevé à ce jour. Ces photographies ont été réalisées entre 2001 et 2006, une période où il s’est passé beaucoup de choses dans ma vie comme dans le monde. Jusque là, je n’arrivais pas trouver la forme définitive de cette série, qui peut exprimer pleinement mes ressentis de cette époque. Mon ambition aujourd’hui est de développer et de transformer ce journal intime, à l’aide du dessin, en une écriture plus personnelle, se prêtant mieux à l’expression de ce vécu. Pour l’instant, cette nouvelle phase du travail reste encore à l’état d’ébauche.
En tous cas, même si je m’éloigne quelque peu de la photographie, l’équipe du prix HSBC reste pour moi comme une famille que l’on n’oublie jamais.

« Les mains pour voir, de Yoshiko Murakami : un magnifique travail tout empreint d’amour et de pudique sensibilité très chaleureuse à l’égard des êtres photographiés. A l’image de ce cliché, La femme au miroir, dans la posture d’être vue, sans se voir, tout en donnant l’illusion de pouvoir le faire ! Un sens du cadrage et une captation de la lumière qui nous fait véritablement voir à la place (et pour) des aveugles. “Je voulais savoir par quoi et comment ils remplacent la lumière et la vision.” Une réussite pour un voyage au centre d’un monde clos, rendu sans voyeurisme ou pitié, dans la beauté des gestes du quotidien, qui rend les aveugles plus proches de nous. »
Alain Mingam, conseiller artistique, 1999.

LIVRE
Monographie Yoshiko Murakami
Les mains pour voir
Editions Actes Sud
ISBN : 2-7427-2434-6
21,34 €

www.baudoin-lebon.com
http://prixhsbc.evenium.com

Merci de vous connecter ou de créer un compte pour lire la suite et accéder aux autres photos.

Installer notre WebApp sur iPhone
Installer notre WebApp sur Android