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Le Questionnaire : Eric Lafforgue par Carole Schmitz

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Eric Lafforgue : Au delà des apparences

Né en France, Eric Lafforgue a commencé sa carrière dans les médias, l’industrie du disque et les applications mobiles. En 2006, il commence à publier ses photos sur Internet via Flickr. Celles-ci sont rapidement remarquées par les magazines du monde entier. S’il a commencé par des portraits, il a rapidement évolué vers des choses plus sociales capturant des moments de vie. Il aime creuser pour aller au de la des apparences.

Son travail sur les tribus de Papouasie-Nouvelle-Guinée a été exposé au célèbre festival « VISA Pour l’Image à Perpignan », France.

Aventurier dans l’âme, il est piqué par le virus du voyage dès l’âge de dix ans lorsqu’il découvre Djibouti, sur la Corne de l’Afrique, Le Yemen et l’Ethiopie… et passe aujourd’hui encore le plus clair de son temps à parcourir le monde, pour partager ses plus belles rencontres avec le regard d’un ethnologue et le coeur d’un artiste. Il privilégie essentiellement les régions ou les populations en danger et souvent méconnus du public tels l’Iraq, l’Afghanistan, la Somalie, l’Angola,  ou la Corée du Nord où il est désormais banni par le gouvernement après 6 séjours. Avec son approche humaniste, Eric Lafforgue offre dans ses photos et récits de voyage un regard positif sur les pays qu’il visite.

Ambassadeur Sony, Eric Lafforgue est aussi membre du studio Hans Lucas depuis septembre 2016.

Son travail est publié dans National Geographic, Der Spiegel, Le Monde, Lonely Planet, Times, Grands Reportages…

 

WEBSITE : www.ericlafforgue.com
INSTAGRAM ericlafforgue

 

Votre premier déclic photographique ?
Eric Lafforgue : Djibouti 1973. Un berger Afar et son chameau, au Minolta de mon père. De loin, car il me faisait peur avec son long couteau traditionnel!

L’homme d’images qui vous inspire ?
Eric Lafforgue : Je n‘avais aucune culture photographique avant d’être dans le business, car j’y suis entré par hasard, donc je donnerais le nom d’un des seuls photographes que je suivais alors : Depardon, à cause des destinations communes que nous avions (Erythrée, Ethiopie…). Connaissant les endroits photographiés, je trouve qu’il est un des seuls à être fidèle à la réalité.

L’image que vous auriez aimé faire ?
Eric Lafforgue : Une photo de Mathieu Paley qui montre une Chinoise qui a mis son argent dans ses bas, dans un train je pense. Parfait.

Celle qui vous a le plus ému ?
Eric Lafforgue : Pas une mais une série de Salgado en Ethiopie, pendant la grande famine des années 80. Il fallait avoir beaucoup de courage pour ramener de tels clichés.

Et celle qui vous a mis en colère ?
Eric Lafforgue : Une photo montrant des kurdes sortant de jours passés dans des caves, en sous vêtements pour montrer qu’ils n’étaient pas armés, vers Mossul je pense. Pourquoi ajouter de la honte à la douleur quand on connaît la pudeur de ce peuple si attachant…

S’il vous fallait ne choisir qu’une image parmi les vôtres, quelle serait-elle ?
Eric Lafforgue : Sans doute Miss Kim, de Corée du Nord. Pour l’histoire qu’il y a derrière cette photo (une guide nord coréenne qui parle un français parfait en vantant les mérites de l’education nord coréenne alors q’en fait elle a vécu toute son enfance en Algérie dans une école francophone avec un papa diplomate!)…

Une image clé dans votre panthéon personnel ?
Eric Lafforgue : Chez moi: la première série que j’ai vendue, sur la Papouasie nouvelle Guinée, à Geo Allemagne. Une série sur les Highlands qui a servi à illustrer un sujet sur les… Asmats. Comme si vous illustriez la vie en Corse par des images de bigoudènes…

Chez les autres: la couverture d’un vieux Nat Geo des années 90 avec une femme iranienne masquée. J’avais l’envie aller voir cette région (Hormozgan) sans imaginer trouver encore de telles tenues au quotidien.

La qualité nécessaire pour être un bon photographe ?
Eric Lafforgue : Ouvrir le bon œil! Et accessoirement ne pas essayer de refaire ce qui a déjà été fait car il y a des chances que ce soit moins bon…

Le secret de l’image parfaite, s’il existe ?
Eric Lafforgue : Celle dont on cherche les défauts parce qu’on est trop « vénère » de ne pas l’avoir prise!

La personne que vous rêveriez de photographier ?
Eric Lafforgue : Bien que je ne fasse que des portraits, pratiquement, je ne rêve pas de photographier quelqu’un en particuliers. Par contre j’aurais bien aimé photographier Mogadiscio avant la guerre civile!

Un livre photos indispensable ?
Eric Lafforgue : Tout Peter Beard, même si on est au delà de la photo pure, je sais je sais!

L’appareil photo de vos débuts ?
Eric Lafforgue : Hasselblad hd 40. Que j’ai étrenné au Vanuatu dans des conditions tout terrain qu’il n a pas aimé mais alors pas du tout, et qui m’a valu de longs échanges avec le SAV! J’étais assez stupide pour penser qu’un appareil haut de gamme ferait de meilleures photos… Allez faire des photos sans pied au moyen format dans la jungle sombre et humide..

Celui que vous utilisez aujourd’hui ?
Eric Lafforgue : Canon Mark IV. Il fait un peu des bruits de jouet mais au final c’est le meilleur compromis  tout terrain / fiabilité / qualité.

Votre drogue préférée ?
Eric Lafforgue : Mon casque Bose , mon meilleur moyen de me couper du monde et de m’évader .

La meilleure façon de se déconnecter pour vous ?
Eric Lafforgue : A une époque, d’aller en Corée du Nord où les téléphones étaient confisqués à l’arrivée jusqu’à ce que j en sois banni. ..

Votre plus grande qualité ?
Eric Lafforgue : Faire ce que je dis et pas toujours dire ce que je fais comme trop de gens sur les réseaux sociaux!

Une image pour illustrer un nouveau billet de banque ?
Eric Lafforgue : Le suisse qui a inventé et abandonné les droits du gel hydroalcoolique. On lui doit bien ça!

Le métier que vous n’auriez pas aimé faire ?
Eric Lafforgue : Tout métier qui nécessite de mettre un réveil pour se lever ou tout métier nécessitant une tâche répétitive… Les levers de soleil  au sommet du mont machin, c’est pas mon truc.

Votre plus grande extravagance en tant que photographe ?
Eric Lafforgue : Avoir formaté par erreur une carte de 256 gigas d’une rare cérémonie tribale en Éthiopie… Et avoir commencé mes portraits à 1,2 avec le 85mm canon. Au final ça a donné une touche très personnelle!

Ce que vous souhaitez partager à travers vos images ?
Eric Lafforgue : Plus que ce que je montre, je souhaite de plus en plus partager ce qu’on me dit sur le terrain.  Allez au delà des images.

La ville, le pays ou la culture que vous rêvez de découvrir ?
Eric Lafforgue : Le Pakistan cela devrait se faire quand le site de l’ambassade ne renverra pas Error 404 au moment de faire « envoyer » pour la demande de visa!

L’endroit dont vous ne vous lassez jamais ?
Eric Lafforgue : Asmara en Érythrée . Le pays n’a pas bonne presse pour de bonnes raisons mais c’est une perle culturelle et architecturale.

Votre plus grand regret ?
Eric Lafforgue : Ne pas avoir visité des pays tels que le Mali, le Niger ,etc quand ils étaient encore surs.

Facebook, Instagram, Tik Tok ou snapchat ?
Eric Lafforgue : Instagram mais leur algorithme me lasse. Si je ne tirais pas d’avantages commerciaux de ce site, je cesserais les posts. Je n’ai pas d’addiction à ces réseaux.

Couleur ou N&B ?
Eric Lafforgue : Couleurs avec le Hasselblad, NB avec le Leica M6 et la triX 400!

Lumière du jour ou lumière artificielle ?
Eric Lafforgue : Je me suis essayé au flash mais je n’ai aucune patience avec les machines et les réglages et j’ai vite abandonné. Ne faire des photos qu’à la lumière naturelle, même faible,  reste un défi plus excitant.

La ville la plus photogénique  ?
Eric Lafforgue : Asmara (Érythrée), encore. L’architecture art deco italienne est sublime.

Si Dieu existait, lui demanderiez-vous de poser pour vous, ou opteriez-vous pour un selfie avec lui ?
Eric Lafforgue : Parce qu’il n existe pas ?! Un selfie, au grand angle, pour frimer en enfer!

L’image qui représente selon vous l’état actuel du monde ?
Eric Lafforgue : Une image vue dans The Guardian: une plage au Sri Lanka que j’ai visitée il y a 20 ans, immaculée, désormais remplie de plastiques et de déchets divers.

Qu’est-ce qui manque dans le monde d’aujourd’hui ?
Eric Lafforgue : Dans le monde de la photo, dire plus souvent la vérité plutôt que d’enjoliver et tromper au final.

Et si tout était à refaire ?
Eric Lafforgue : Je n’oublierais pas de mettre une pellicule dans  mon Leica M6 la première fois que je m’en suis servi au Yemen!

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