En 1998, j’étais à New York où je travaillais pour American Photo.
Cette année-là, avec David Schonauer son rédacteur en chef, nous avons réalisé un numero special sur les mythiques collectionneurs de l’époque : Marion Lambert, Pierre Apraxine, Roger Thérond, Manfred Heating, Werner Bokelberg et bien sûr Thomas Walther.
Profitant de leur présence à New York, nous les avons fait photographier par Harry Benson au temple de Dandur que le Metropolitan Museum avait mis à notre disposition !
Carole Squiers, la rédactrice d’American Photo avait alors écrit ce texte sur Thomas.
Jean-Jacques Naudet
Thomas Walther
“Je n’ai jamais recherché les chefs-d’œuvre per se”, dit Thomas Walther. “Je me concentre exclusivement et intensément sur l’image elle-même : elle doit me parler ; elle doit être évocatrice.”
Walther ne cherchait pas de chefs-d’œuvre, mais il les trouva quand même, pris par les figures imposantes de la photographie moderne, dont Alfred Stieglitz, Man Ray, El Lissitzky, Alexander Rodchenko, Edward Weston et Paul Outerbridge.
Depuis qu’il a commencé à collectionner en 1979, il a rassemblé ce qui est probablement la collection privée la plus complète de photographies de l’ère monumentale de création entre les deux guerres mondiales.
“J’ai essayé de former une gestalt”, dit-il, “de rassembler l’ensemble de l’accomplissement d’une époque avec de nombreux exemples significatifs et variés”.
En cours de route, Walther s’est rendu compte que la clarté de la vision moderne observée dans la photographie de l’entre-deux-guerres avait des précurseurs au XIXe siècle. Au cours des cinq dernières années, il a acquis des images qu’il considère comme des tremplins visuels vers la sensibilité moderniste, de photographes comme William Henry Fox Talbot, Carleton Watkins, Roger Fenton et Charles Nègre.
Aux côtés des grands noms, Walther possède également des œuvres de photographes méconnus et anonymes. Ce type de photographie vernaculaire peut tout inclure, des portraits d’animaux à la photographie de crime.
“Les images plutôt obscures, fantaisistes qui ne rentrent dans aucune catégorie m’intéressent le plus”, dit-il. “C’est ma propre vision que j’essaie de retrouver dans le vernaculaire.”
La photographie d’entre-deux-guerres fait fureur aujourd’hui. Mais ce n’était guère à la mode quand Walther a commencé, sauf parmi un petit groupe de personnes. “Jeune homme, j’étais un peu rebelle sans cause”, dit Walther, “et j’ai trouvé ma cause dans la photographie, à la recherche des images qui allaient à contre-courant.” Il se souvient cependant que dans ses premières années de collectionneur, “certains d’entre nous se sont interrogés sur le fait de dépenser des sommes d’argent relativement importantes pour des choses qui ne préoccupaient pratiquement personne.”
Ces images sont maintenant très prisées.
Carole Squiers
Chefs-d’œuvre photographiques du MoMA. La collection Thomas Walther est organisée par The Museum of Modern Art, New York
Chefs-d’œuvre photographiques du MoMA : La Collection Thomas Walther
Jusqu’au 13 février 2022
Jeu de Paume
1, place de la Concorde
75001 Paris