Jean Claude Lemagny. Il fut le conseiller, le père, le héros, le mentor de toute la photographie artistique de 1970 aux années 2000. Le visiter dans son bureau à la Bibliothèque Nationale ou dans la salle qui portait son nom à l’hôtel Arlatan en Arles pendant le festival était pour beaucoup un “must” absolu, une recherche de bénediction incontournable.
Quel couple étonnant il a formé avec sa femme Anne Biroleau, autre figure formidable de la photographie contemporaine a la Bibliothèque Nationale !
C’est l’hommage de Bernard Descamps que nous publions aujourd’hui !
Jean-Jacques Naudet
En France, dans les années 70, la photographie d’auteur, était très peu représentée, peu reconnue. Je me souviens que je trouvais la revue suisse camera dans un des kiosks du boulevard Saint Michel, revue extraordinaire, tant pour ses choix, ses textes que par la qualité de reproduction des images. Je me souviens aussi de l’ouverture de la galerie de photographies Agathe Gaillard en 1975. La première du genre à Paris. Assez peu de choses pour satisfaire l’appétit d’un jeune photographe!
Heureusement il y avait la bibliothèque nationale, le cabinet des estampes et Jean-Claude Lemagny, conservateur pour la photographie contemporaine.
Je me souviens des rendez vous dans son petit bureau et des photographies étalées à la hâte, avec ces petits tremblements de la main, qui annoncent un rendez vous important…
Jean-Claude ne comptait pas son temps, il recevait nombre de photographes, français ou étrangers, de passage à Paris, car, nous ne le savions pas vraiment, mais Jean-Claude Lemagny était une référence mondiale pour la photographie contemporaine.
Nous sommes aujourd’hui très nombreux à lui rendre hommage en se souvenant de ces moments merveilleux passés en sa compagnie.
Jean-Claude connaissait parfaitement son sujet (et beaucoup d’autres aussi!) et parlait de photographie comme on parle de philosophie, reliant les « mouvements » photographiques aux mouvements sociaux, politiques et intellectuels…
Je me souviens être descendu avec lui dans les sous sols de la BN, de parcourir les travées des archives photos, et de Jean-Claude prenant un de ces grands albums pour me montrer d’étonnants photographes polonais ou tchécoslovaques, une série historique de Jean-Philippe Charbonnier sur la guerre d’Algérie, ou encore de si belles images de New York sous la neige vu par André Kertesz.
Jean-Claude Lemagny a été mon Maître, mon guide il m’a appris l’essentiel. Je lui dois énormément
Ses interventions dans quelques conférences, ou dans les réunions du club des 30×40, haut lieu des débats sur l’art et la photographie, à cette époque, avaient un réel succès, tout comme ses célèbres « lectures de port folios » à Arles .
Il nous reste , au delà de ces souvenirs, des textes essentiels, et quelques livres, comme L’ombre et le temps.
Jean-Claude Lemagny aura incarné une époque, une époque charnière de la photographie.
En 1975 il proposa, à la bibliothèque nationale, une exposition de la jeune photographie française en réunissant les premiers travaux de Bruno Réquillart, Eddie Kuligowski, Bernard Plossu et moi même.
Bernard Descamps
Janvier 2023
