A l’occasion du mois de la photographie et en marge du « Paris Photo 2022 », la Galerie Nouchine Pahlevan présente « I Want Him To Be Ocean » de Christian Mamoun .
Cette exposition s’invite au cœur d’une sorte de salle d’attente avant d’entrer dans le monde adulte.
En attendant, cette jeunesse parisienne se questionne, est confrontée à des pulsions « sturm et drang » ( la tempête et la pulsion), qu’elle décide de vivre intensément. L’amour, les questions de genre, ou la fête excessive sont des sujets que l’on retrouve au cœur du travail de Christian Mamoun.
Finalement, comment se sentir soi-même pleinement ? Eléments de réponse avec cette exposition. Christian Mamoun nait en 1990. Sa mère est franco-allemande et son père marocain. Il passe son enfance à Berlin, où il intègre les écoles Waldorf.
Il s’initie aux arts et découvre la notion de liberté. Liberté d’être, de mouvement et la revendication de soi, qui se retranscrira plus tard dans son travail d’artiste. Après plusieurs années passées à Berlin, Christian décide de se rapprocher de sa famille paternelle, et s’envole pour le Maroc.
Il restera un an dans le royaume avant de faire une rencontre déterminante sur une dune de Merzouga. Il prend la décision de s’installer en France afin de poursuivre des études d’arts aux Beaux-Arts de Nantes. Il fait également ses armes à la HEAD de Genève et pose ses valises à Paris où il étudie la photographie à l’ENSAD.
Fasciné par le nu qu’il n’a jamais perçu comme érotique mais plutôt comme une liberté d’expression. Christian a toujours poussé sa réflexion autour du nu et de sa représentation, autant dans l’art que dans la réalité.:
Aussi loin que je remonte dans mes souvenirs d’enfance en Allemagne, quand on allait au lac, on était nu.
Etre nu en public dans la culture allemande était une banalité, une évidence, cela ne prêtait ni à sourire, ni à choquer. C’était juste logique pour se baigner.
Aujourd’hui être nu semble être un danger, une transgression, un manque de pudeur. Le mot est lâché, nous serions tous devenus plus prudes, tous puritains. Le coupable est désigné, il s’agit de la reproduction des codes de la culture américaine qui s’impose partout sur les images.
L’Amérique puritaine a gagné. Le sein du scandale.
Instagram a cédé aussi. Non, il en a toujours été ainsi dans cet univers de la photo. Les règles sont établies. Ceux qui transgressent disparaissent, effacés du jour au lendemain, irrécupérables.
Les artistes qui osent le nu sont sous le diktat, ils perdent en visibilité. Des années de travail partent dans les limbes du numérique. Disparu. L’artiste abattu. Le téton de la discorde.
Le Louvre à Paris ou la Gemäldegallérie à Berlin nous ramènent au réel de l’art : le nu est notre patrimoine commun.
Millénaire. J’aime cette culture : elle fait place au nu, à l’érotisme. Libre à chacun de s’y projeter. La vulve de la résistance. Je suis dans la tradition picturale européenne et m’oppose radicalement à
la colonisation culturelle de nos valeurs par les applications de la « culture populaire » américaine. Resistance.
Je raconte et décris comme les peintres de l’époque, les histoires d’amour, la faim de vie, la nécessité de vivre le moment, désir et « lust » de notre génération entre « angst » « lust » et « now » sans lendemain, avec un futur pas rassurant et sans censure.
Tout montrer, loin des canons imposés. Le corps de la subversion.
Assumer la nudité semble aujourd’hui presque un acte militant, un combat pour la normalisation du corps et sa représentation. Il est beau, il nous dit quelque chose du temps, il nous raconte. Radicalement en opposition à la culture des réseaux sociaux.
La nudité revendiquée.
Christian Mamoun : I Want Him To Be Ocean
Jusqu’au 26 novembre 2022
Galerie Nouchine Pahlevan
47 rue Chapon
Paris, 75003
