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Galerie Le Château d’Eau : Anne-Lou Buzot : La théorie de l’horizon

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Un certain penchant pour le penché.
Par Jean-Jacques Ader

Grâce à la découverte d’archives familiales oubliées, la photographe Anne-Lou Buzot révèle au grand jour une théorie pour le moins singulière, celle qui questionne l’inclinaison de l’horizon sur de nombreuses photographies.

Pendant ses travaux de rénovation, la Galerie Le Château d’eau n’en reste pas moins active au sein des locaux de l’ancien musée de l ‘affiche à Toulouse. Pour preuve cette exposition tout à fait originale. Un jour de 2019, une boite d’archives est retrouvée dans la maison familiale par Anne-Lou Buzot, photographe, éditrice et enseignante. Dedans se trouvent des documents, textes et images, relevant d’une mystérieuse Société de l’Horizon Incliné. Créée en 1881 par quelques érudits parisiens ; elle prendrait la suite des travaux de la Tilted Horizon Society of Great Britain, d’outre Manche.

La photographie étant considérée dans cette seconde partie du 19e siècle comme le moyen de reproduction visuelle le plus fidèle, certains se demandent donc pourquoi autant de représentations photographiques de paysages possèdent leur ligne d’horizon inclinée ? Ou mieux, la photographie ne nous démontre t-elle pas que l’horizon penche ? Le doute était permis…

Devait-on revoir notre point de vue, notre savoir, et faire confiance à la technique ? Active durant une dizaine d’années, la société savante des quatre fondateurs comptera jusqu’à trente membres, même Gustave Le Gray en est. Ils se réuniront régulièrement, partant en excursion jusqu’en bord de mer, pour en étudier avec méthode le parallélisme du panorama, et satisfaire ainsi leur penchant pour le penché.

L’horizon incliné refait surface, si l’on peut dire, au début des années 1900, sous l’impulsion du bien nommé Constantin Belœil, dissident de la société savante d’origine, à la tête des Disciples de l’Horizon Incliné. Celui-ci prenant un peu trop dramatiquement à cœur le degré de pente du paysage, jusqu’à en prédire sa disparition totale. Accompagné de quelques fidèles, il mettra fin à ses jours, à la fois paniqué et indigné du mépris de ses confrères pour son hypothèse fatale. Les années 50 et 60 correspondront pourtant à l’âge d’or du paysage pentu ; l’association comptera 150 membres, développant un esprit plus convivial et ludique que leurs prédécesseurs.

Anne-Lou Buzot, reconnaissant son inclinaison pour l’incliné, décidera de fonder The Tilted Horizon Society, en référence à la première société britannique, avec la vocation d’en diffuser les nombreuses archives et d’en enrichir le fonds.

L’expression scruter l’horizon ne pouvait pas mieux trouver son sens. Ces images de perspectives distordues nous transportent dans l’espace du visible et de l’invisible, et nous parlent d’un monde qui va de travers. Surtout, elles interrogent et relativisent les qualités de représentation du réel par la photographie, tout en en révélant la puissance évocatrice et les attentes que nous y projetons tous.

Projetez-vous donc vous-même dans cette proposition estivale et réjouissante, et surtout, parcourez toutes les salles jusqu’à la dernière, qui vous fera sans doute revoir… votre point de vue.

Jean-Jacques Ader

 

« La théorie de l’horizon incliné » d’Anne-Lou Buzot,
exposition de la Galerie Le Château d’Eau, à Toulouse – adresse temporaire : 58 allées Charles de Fitte 31300
du 11 Juillet au 1er Septembre. Informations : https://chateaudeau.toulouse.fr/

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