À l’occasion de Paris Photo 2024, la galerie Christian Berst Art Brut présentait environ soixante-dix photographies ainsi que des vidéos Super 8 réalisées par John Kayser.
Des montages inédits des vidéos étaient diffusés sur deux écrans. Si la photographie de nu servait aux artistes du XIXe siècle à se dispenser du modèle vivant durant l’exécution d’un tableau, on se demande dans quelle mesure John Kayser (1922-2007) n’essaie pas pareillement de créer un support pour prolonger incessamment les émotions que lui procuraient ces séances de poses.
Pas plus que les photographies des peintres, celles de John Kayser n’avaient initialement vocation à sortir du secret de l’atelier. Pour fascinantes qu’elles soient, les centaines de clichés et de films Super 8 réalisés entre 1959 et 1976 que nous a laissés cet employé d’une entreprise aéronautique de Los Angeles provoquent, en même temps qu’elles interrogent.
Comment comprendre sa fascination pour les corps les plus graciles au contact des matières les plus diverses, et parfois les plus incongrues ? Comme si le poids que ces corps pouvaient exercer les rendait plus vivants, donc plus désirables.
Comme si le rituel du piétinement ou de la lacération de fleurs et de livres par un talon aiguille accentuait la transgression. Mais les photographies et les films de John Kayser nous enjoignent également à les replacer dans le contexte de leur époque, dans une société corsetée par un puritanisme qui les condamnait à la clandestinité.
Aujourd’hui, au-delà de la sensualité et de la part de jeu qu’elles recèlent, ces images nous invitent aussi à reconsidérer la disruptivité de l’art au regard de l’ordre moral ou social.
C’est sa capacité à nous déplacer – à nous mouvoir autant qu’à nous émouvoir – qui est ici en jeu.
Galerie Christian Berst Art Brut
3-5 Passage des Gravilliers
75003 Paris
www.christianberst.com