Avec la plateforme numérique Elles font la culture, le Ministère de la culture entend aider les femmes et minorités de genre à développer leur carrière. Laurie Chapotte et Sarah Witt nous présentent Elles font la culture, la nouvelle plateforme du ministère de la culture destinée aux femmes photographes.
Pourriez-vous commencer par vous présenter ainsi que les autres membres d’Elles font la culture ?
Nous sommes cinq femmes derrière Elles font la culture. Jennifer Stephan, qui est coach pour la création de produits numériques, notre développeuse Nadia Auger, Lauriane Fort, chargée de produit, et nous deux, Sarah Witt en tant que chargée de déploiement et Laurie Chapotte, designeuse et co-animatrice de l’Atelier numérique du ministère de la Culture.
Qu’est-ce que la plateforme Elles font la culture ?
Elles font la culture est un service numérique dont le projet est né début 2021, suite à une interpellation de la mission égalité du ministère de la culture, soulevant le problème de la parité au sein de la photographie. Pour y répondre nous avons réalisé un travail de recherche auprès de femmes photographes, d’institutions culturelles, de galeries, et d’associations pour définir précisément les difficultés rencontrées mais aussi observer si des réponses avaient déjà été mise en place. À partir de là nous évaluons si un outil numérique serait une réponse adaptée, en essayant plusieurs ressources.
Quels types de ressources essayez-vous ?
Pour une meilleure visibilité des aides existantes, nous avons recensé sur une page de notre site les différentes bourses, appels à projets et résidences disponibles. À ce jour 163 aides sont listées. Une page Ressources a également été mise en place, composée de nombreux articles visant à aider les photographes sur des aspects quotidiens de leur vie. Cela peut aller d’une vidéo sur la gestion du temps lors de la maternité à la tarification, en passant par l’organisation de sa première exposition ou l’intérêt de rejoindre un collectif.
Il y a aussi une volonté de créer une communauté
Oui, nous avons d’ailleurs créer un groupe sur Facebook pour que les femmes photographes puissent échanger. Les autres ressources que nous expérimentons s’inscrivent d’ailleurs dans une volonté de créer plus d’échanges : nous avons réalisé des webinaires et conférences en ligne sur des sujets variés tels que les questions juridiques, les coulisses de la photographie de mode ou encore les dossiers de candidature. Pour aller plus loin sur ce dernier sujet nous avons demandé à plusieurs lauréates d’appels à projet si elles accepteraient de partager leurs dossiers de candidature pour servir de modèle. À partir de ces documents nous avons créé une bibliothèque accessible en ligne. Enfin, toujours sur une idée d’entraide, nous avons mis en place des lectures de portfolio ainsi qu’une enquête sur la tarification à appliquer. Toutes ces ressources ont été mises en place en réponse aux besoins formulés par les femmes que nous avons interrogées lors de notre phase de recherche.
Quels types de difficultés ont été relevées lors de cette phase de recherche ?
Avant tout, on voit dans les chiffres que les femmes sont très présentes dans les écoles de photographie mais qu’elles disparaissent par la suite. Il y a un véritable noeud autour des trente ans, où il n’y a plus les prix à la jeune création mais aussi la question de la maternité se pose. À ce moment-là il y a un décrochage qui se passe pour les femmes. On essaie de mettre un maximum de piliers et de ressources pour contrer ce phénomène. Pour cela nous avons voulu proposer des réponses pratiques à des difficultés précises. Les clubs utilisatrices que nous avons organisés ont ainsi permis de souligner plusieurs problèmes, liés à la précarité et l’isolement, la faible visibilité des opportunités, le manque de légitimité dû à l’absence de modèles féminins dans les postes importants, des ressources techniques et professionnalisantes lacunaires à la sortie de l’école ainsi que les violences sexistes et le harcèlement.
Quels ont été les premiers retours ?
Nous avons reçu des retours globalement positifs de la part des utilisatrices, notamment sur la facilitation des démarches que permet cet outillage. Néanmoins, celles-ci ont aussi soulevé une question fondamentale, celle de la part des institutions. Dans ces écosystèmes qui les programment, il y a un manque de formation quant à la parité. Nous avons donc décidé de réaliser une infographie afin de rendre visibles les inégalités et d’acculturer à ce problème en-delà des femmes directement affectées. Afin d’amener les institutions à regarder ces chiffres nous avons mis en place un index évaluant la parité au sein des structures, que ce soit à la direction ou dans les photographes exposé.e.s. On aimerait aller plus loin sur ces chiffres de manière à formuler des propositions pour induire plus de parité. Nous avons beaucoup d’espoir pour que cet index parité puisse faire bouger les choses. Il est encore très récent et nous allons le développer.
Existe-t-il des initiatives similaires en France et à l’international ?
En France, nous sommes en contact régulier avec Les Filles de la Photo et La Part des Femmes. Au niveau international plusieurs initiatives existent, notamment International Women in Photo, Fotofemmeunited, Women in Motion, Como ser fotografa.
Quel est le genre photographique le plus touché par les inégalités ?
Dans la presse les chiffres sont bien plus catastrophiques que dans la mode et la photographie artistique, où la parité est plus respectée. Les femmes photo-journalistes sont celles qui souffrent le plus. Il suffit de regarder la différence entre Arles et Visa pour l’image.
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