Déja le titre du livre est sublime Whatever You Say, Say Nothing (Quoi que tu dises, ne dis rien) !
C’est le livre de Gilles Peress. C’est un événement.
Une chose rarement vécue. Voir naître un monument qui sera dès la fin de l’année dans toutes les bibliothèques dignes de ce nom.
On l’attendait depuis presque 50 ans, depuis ce jour de 1972 en Irlande gravé dans l’histoire sous le nom de Bloody Sunday.
Un travail de fou pour aller au bout d’une passion et donner naissance à un monument de 10 kilogs en 3 volumes.
Celui-ci conjugue avec une rare intelligence : le propos, le témoignage, la fiction documentaire, la beauté des images et la qualité rare de la reproduction.
C’est avec Gilles Peress que j’ai fait mon premier reportage à PHOTO il y a un siècle : une interview en Toscane de Willy Fleckhaus, le mythique directeur artistique de Twen magazine. Nous nous sommes plus tard retrouvés à New York où nous nous étions trouvés une cantine nostalgique : Pierre au Tunnel.
Comme tout le monde, j’ai hurlé face à la lenteur de Gilles de publier et diffuser ses images. Et puis là, je comprends : la force de la photographie est d’arrêter le temps, pas de l’accélérer !
Jean-Jacques Naudet
Gilles Peress est né en France et a étudié les sciences politiques et la philosophie. Les échecs de 1968 à Paris, et l’écart insupportable qu’ils ont révélé entre le langage – politique, théorique et institutionnel – et la réalité, l’ont conduit à rechercher une nouvelle stratégie d’engagement avec le monde. En 1971, la caméra devient son intermédiaire, l’outil dont il a besoin pour traiter son rapport au réel et garder sa raison.
Avec ses amis et contemporains Josef Koudelka et Raymond Depardon, il s’oppose à la reproduction réductrice des images attendues qui prolifèrent chez les imitateurs d’Henri Cartier-Bresson. Sa période de maturité commence avec le livre fondateur Telex Persan, qui réinitialise les attentes quant à la façon dont les photographies elles-mêmes dans leur construction ainsi que la façon dont les livres photographiques pourraient s’engager avec un événement historique comme la révolution iranienne. Après Telex, Peress est retourné en Irlande tout au long des années 1980 pour produire ce qui est devenu What You Say, Say Nothing, le récit récemment publié de 1000 pages que Peter Galassi, conservateur en chef de la photographie au Museum of Modern Art, a décrit comme ayant « l’immédiateté saisissante et l’ampleur épique d’un roman de Tolstoï. »
Tout au long des années 1990, Peress s’est consacré à de longues explorations des conflits et des génocides au Rwanda (The Silence) et dans les Balkans (Farewell to Bosnia; The Graves: Srebrenica and Vukovar), qui ont évolué vers Hate Thy Brother, un cycle de récits imbriqués dans des livres et sur les murs. Cette période a vu une nouvelle poussée dans l’installation en temps réel, avec des expositions dans des lieux tels que le Musée d’art moderne, Pompidou, PS1 et le Corcoran se produisant presque simultanément avec les conflits qu’ils représentaient. Ces dernières années, Peress a continué Hate Thy Brother en revisitant à la fois le travail d’archives et les sites où il a été réalisé, et en étendant la série à de nouveaux endroits, dont la Palestine et Israël.
L’œuvre très puissante de Peress vit intentionnellement dans le no man’s land entre l’art, le documentaire, l’histoire, le droit, le film, le papier et les murs, s’efforçant perpétuellement de lutter contre les banalités de l’attente tout en réaffirmant la valeur du langage visuel. Comme l’écrit Susie Linfield dans The Cruel Radiance, “Les postmodernes et les poststructuralistes se considéraient comme les héritiers de Walter Benjamin, mais son imagination dialectique leur a échappé : ils n’ont jamais saisi sa façon de voir. Ils ne pouvaient pas comprendre qu’une photographie soit objective et subjective, trouvée et réalisée, morte et vivante, dissimulée et révélatrice… Mais Peress le pouvait. Son génie a été d’accomplir exactement ce que les postmodernes ne pouvaient pas : incorporer une critique de l’objectivité de la photographie dans ce morceau obstiné de folklore bourgeois anciennement connu sous le nom de vérité. Il embrasse le scepticisme postmoderne, mais l’utilise pour élargir les possibilités photographiques plutôt que pour discréditer le médium.”
La publication de What You Say, Say Nothing marque le début d’une période rétrospective majeure dans la carrière de Peress, qui revisitera son travail d’Iran, des Balkans, d’Israël et de Palestine, et sa ville d’adoption New York.
Gilles Peress : Whatever You Say, Say Nothing
Publié par Steidl
Conception du livre : Gilles Peress avec Karina Eckmeier
Etui et design typographique par Yolanda Cuomo Studio
1960 pages, 1296 images
14,75 x 10 po / 37,5 x 25,5 cm
Noir et blanc
Deux couvertures reliées en tissu et une brochure obligatoire emballées dans des boîtes en carton, logé dans un sac.
480,00 $ US / 425,00 €
ISBN 978-3-95829-544-5
Chaque exemplaire accompagné par Annals of the North
Gilles Peress, Chris Klatell : Annals of the North
Publié par Steidl
Photographies : Gilles Peress
Texte : Chris Klatell, Gilles Peress, Nan Richardson, Pauline Vermare
Conception du livre : Gilles Peress avec Katina Eckmeier
Typographie : Yolanda Cuomo
904 pages, 316 images
Brochure Otabind
7,75 x 10,25 pouces / 19,7 x 26 cm
Couleur et noir et blanc
85,00 $ US / 75,00 €
ISBN 978-3-95829-793-7