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Black Swan Bruges : Savoir Retenir et Fixer ce qui est Sublime

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Lorsqu’on pense à Bruges, on associe généralement la belle ville aux canaux, à l’atmosphère médiévale, à la Venise du Nord – et pas immédiatement à l’art contemporain.

Pourtant, il existe quelques acteurs qui proposent toujours une bonne offre d’expositions et d’initiatives. L’un d’eux est la galerie Black Swan, située sur le magnifique Lange Rij, l’initiative inspirée de Kristoff Tillieu et Lieve De Cuyper. Leur dernière exposition en date vaut vraiment le détour – mais d’abord une introduction.

L' »objet trouvé » a sa place dans l’histoire de l’art : un auteur fait référence à Duchamp et un autre aux cubistes. Il n’est pas tellement pertinent d’indiquer qui a été le premier, mais il est certain qu’aux alentours de 1910, l' »objet trouvé » au sens large du terme s’insinue dans la production artistique. Avec les cubistes, comme Gris, Picasso et Braque vers 1911, avec les montages/collages des dadaïstes à partir de 1915, ou comme Fountain (1917) le ready-made de R. Mutt, ( en fait Marcel Duchamp (1887-1968), ou plutôt la baronne Elsa von Freytag-Loringhoven (1874-1927) comme auteur original de l’objet) – pour chacun de ces mouvements la période 1910-1917 a été le tournant.

Dans le monde de l’art « classique », les techniques mentionnées ci-dessus sont fréquemment utilisées par la suite : pensez au pop art, fortement influencé par le mouvement Dada, mais aussi à Tracy Emin (1963), avec son « My Bed ».

En photographie, la situation est quelque peu différente. Ce n’est qu’à la fin des années 1970 que l’on s’est intéressé à « l’image trouvée ». L’accent a été mis sur la photographie vernaculaire, dans laquelle l’image trouvée anonyme du photographe local ou de l’amateur inspiré a été valorisée et a même reçu une valeur muséale – nous pensons par exemple aux premières publications de Michel Frizot ou à « l’Amérique au fil des jours » de la série PhotoPoche.

À la même époque, les artistes commencent également à s’approprier l’image et la rephotographie fait son apparition. L’un des exemples les plus célèbres (et controversés) est celui de Richard Prince. Outre la rephotographie, les artistes ont également commencé à utiliser l’image photographique trouvée pour l’intégrer à leur propre projet artistique. Et c’est ici que nous renouons avec l’actualité artistique de l’exposition à Bruges.

Sous le titre « Savoir Retenir et Fixer ce qui est Sublime », le Black Swan a sélectionné quatre artistes internationaux : Marianne Csáky, Tamara Dees (Nl, 1971), Simon Verheylesonne (Be, 1991) et Guy Vording. Le titre fait référence à une œuvre de la célèbre photographe belge Marie-Jo Lafontaine (1950) – sur la question de savoir si les images capturent et peuvent transmettre le sublime. Tous les artistes sélectionnés partent d’images trouvées, qu’ils éditent, grattent, auxquelles ils ajoutent des éléments, et les manipulent dans leur recherche de leur description du sublime. Dans notre analyse, nous souhaitons nous intéresser de plus près à deux d’entre eux.

Guy Vording (1985) est un jeune Hollandais, découvert lors d’Art Rotterdam 2017. Son point de départ sont les vieux magazines Life qu’il collectionne. Il regarde les images, puis découpe un passage. Avec un crayon ou de l’encre de Chine, il efface l’information, ou dessine un contexte à celle-ci. Il retravaille le bloc de texte, la légende sous l’image, de manière identique. Le résultat est ce qu’il décrit comme des « pages noires », des feuilles de papier qui interpellent le spectateur, le font réfléchir, sourire ou s’émouvoir.

L’exposition présente également des œuvres qu’il décrit comme « Vanish into thin air is more polite ». Il y applique la technique du découpage.

Il aborde des thèmes très divers, parfois sociaux, parfois personnels. Il aborde la prise de décision politique, la position sociale, la rat race, le matérialisme, la douleur existentielle, la dépression, la solitude, le genre et l’identité, parfois avec un rire cynique inaudible, mais toujours avec virtuosité. Parce que les images ont été découpées dans des magazines de la période 1930-1970, elles sont imprégnées de nostalgie et évoquent l’atmosphère d’Hollywood, du Film Noir, du glamour, du rêve américain & … du cauchemar américain.

Sa contribution à l’exposition comprend également un nouveau livre (2020) limité (500 exemplaires numérotés). Nous vous le recommandons vivement !

Marianne Csáky (1959) est une artiste hongroise de renom dont l’œuvre est très diversifiée, tant en termes de thèmes que d’approches. Une sculpture intitulée Symposium (1990), qui date du début de sa carrière, est une déclaration sans équivoque : l’androgynie, Eros et Thanatos réunis en une seule image.

Son grand-père a été contraint de vivre dans une ferme autarcique en 1956, et c’est là que Marianne Csáky a grandi, avec son frère. Son grand-père produisait, entre autres, des peaux, qui apparaissent fréquemment dans l’œuvre plastique de l’artiste.

Aussi forte que soit son œuvre plastique, nous l’avons choisie ici pour son travail « photographique ». Csáky se penche sur son passé, sur la relation avec sa mère, avec ses grands-parents et avec son frère aujourd’hui décédé, à l’aide de photos et de films provenant des riches archives familiales du grand-père. En combinant les images dans Time Leap, elle franchit les frontières du temps et de l’espace et entame un dialogue par l’image là où les mots n’ont jamais été prononcés.

Dans la série Time Tunnel, elle poursuit un dialogue (non-dit ?) dans le présent. Elle se place dans une confrontation avec une personne non identifiée, et nous voyons dans une image comment les deux se déplacent. Ici aussi, Csáky joue avec le concept du temps et abolit la frontière entre la photographie et le cinéma. Un travail remarquable qui devrait être plus largement connu !

Un livre de l’historienne d’art Erzsébet Tatai sur l’œuvre de Marianne Csáky est présenté à l’exposition. Il analyse son travail de manière chronologique et est bien illustré. Il traite en profondeur les thèmes de l’œuvre et constitue une littérature recommandée pour tout artiste et amateur d’art qui s’intéresse à la mémoire, au temps, à l’image, à la nudité, à la pornographie, à la mort et au corps.

 

Guy Vording: Thank you so much. It was awful.
Black Pages Made Between 2014 & 2019

Amsterdam 2020
ISBN 878-90-831045-2-2

Édition limitée de 160 pages noires.
couverture rigide, 240 x 340 x 25mm, néerlandais/anglais (au vu du contenu, la langue n’est pas un réel obstacle)
€ 59,-

Ce livre est disponible auprès de :

www.guyvording.com

https://www.dudokdegroot.nl

https://blackswangallery.be/

 

Erzsébet Tatai: MARIANNE CSAKY
Budapest, Libratallér Bt, 2015
ISBN: 978-963-12-0816-0

272 pages avec 106 images.
Broché, double couverture avec rabats 165 x 200 x 22mm anglais/hongrois.
€22

Ce deuxième livre est disponible auprès de :

Wiels Bookshop, Avenue Van Volxemlaan 354, 1190 Brussel, Belgium
Peinture Fraiche, 10 rue du Tabellion, 1050 Brussels, Belgium
Írók Boltja, Andrássy út 45, 1061 Budapest, Hungary
Inda Gallery, Király u. 34, 1061 Budapest, Hungary
http://www.mariannecsaky.be/contact.htm

 

‘Savoir Retenir et Fixer ce qui est Sublime’ au Black Swan Bruges jusqu’au 26 septembre.

Black Swan Gallery, Langerei 24 – 8000 Brugge – België

https://blackswangallery.be/

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