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Bernard Plossu : Roma

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Au début des années soixante-dix, passage à Rome, pendant un hiver froid et pluvieux ; aucune photo de bonne, j’avais un grand-angle ! sauf deux ou trois à Pompéi silencieuse et vide sous la pluie merveilleuse…

Plus tard, en 1979, ayant enfin compris la force discrète du 50 mm, venant des hauts plateaux de Taos au Nouveau-Mexique ou j’habitais, je retrouve à Rome Claude Nori, et là, c’est le choc visuel : est-ce le fait d’habiter dans le désert qui fait que cette ville me fascine en comparaison ?

Disons que les images de l’Ouest américain sont souvent horizontales et que celles des rues de Rome sont souvent verticales ! et que m’imprègne aussi très fortement l’œuvre romaine de Corot, auquel je pense si souvent là-bas… Corot qui m’a marqué définitivement par sa sobriété.

À Rome, on retrouve Paola et Luigi Ghirri, chez Mies et Mario de la galerie Rondanini, et aussi, on est tout jeunes, Monterosso !

En 1980, retour à Rome avec Françoise, mon amour pour toujours, Andalouse si italienne !

Il pleut à torrents devant la fenêtre de notre petit hôtel près de la piazza Panteon… Nous allons à la Villa Giulia, le musée étrusque où je photographie un vase simple comme un Morandi…

Les années passeront, jusqu’au retour en Europe, et je suis dorénavant sous l’influence très forte du mouvement de peinture appelé « La Scuola Romana » (Mafai, Scipione, Pirandello, Antonietta Raphael, Afro) : des merveilles qui m’inspirent beaucoup.

Nombreuses visites : Rome m’attire sans arrêt, j’y vais presque chaque année et je photographie en désordre, surtout rien de systématique ni d’organisé ! Quartier par quartier, n’écoutant que mon instinct et surtout ma passion : je suis amoureux fou de cette ville et, en même temps, de toutes les petites îles italiennes ou je vais aussi le plus souvent possible !

Je retrouve souvent Lætitia et Patrick Talbot qui y vivent ; en 2000, Patrick réussit à m’emmener visiter tout le palais Farnèse ! ! Et la même année, je visite le lieu le plus métaphysique qui soit : la centrale Montemartini, ancienne centrale électrique transformée en musée de la sculpture : tellement noir et blanc pour un photographe ! Puis je retrouve chez eux Jean-Christophe Bailly pour l’exposition « Col Treno » sur l’Italie vue du train… Et toujours en tête Corot. Je suis possédé par Rome, pour moi une ville métaphysique et pas fellinienne. C’est à Rome qu’est tournée La Notte brava de Bolognini, d’après Pasolini, avec la si belle Antonella Lualdi, inoubliable… C’est aussi à Rome que commence Le Fanfaron, Il Sorpasso du grand Dino Risi. Et aussi je me régale avec les films où tourne Alberto Sordi, le Romain des Romains !…

De son côté, Jean Digne, à l’Institut Français de Naples « Le Grenoble », avait fait venir des tas d’artistes de disciplines différentes.

Tout cela se construit image après image…

Tout au 50 mm en noir et blanc, effets interdits, vision pure, classique – moderne quoi !

Une seule vue du Colisée, les cris des morts et des gladiateurs mourant pour le plaisir de la foule me hantent trop…

Visites de Tivoli et de la Villa Adriana avec Régine Detienne, Jocelyne Rolland, Daniel Zolinsky, Michel Castermans au volant dans les embouteillages de la banlieue… : photos.

En 2001, je me rends seul à Ostia, hommage à Pasolini ; il fait beau et chaud en juin, les plages sont remplies de Romains fuyant la ville le week-end…

On est bien, seul, pour errer en images ! Je me prends un petit hôtel…

Repassant en 2005, visite chez l’architecte Fuksas dans ses bureaux romains. Tout cela est prétexte à découvrir d’autres quartiers et à d’innombrables photos, en véritable « état de photographie » !

Tous ces souvenirs ont ainsi « fait » cet ensemble sur Rome…

En rentrant, je tombe sur les petits tableaux italiens de Granet au musée Granet à Aix-en-Provence, que Bruno Ely me fait découvrir : lui aussi voyait en petit, en tout cas ces paysages-là, sans aucun effet, comme de la photographie, pourrait-on même dire !

Fernand Braudel, dans son livre Le Modèle italien, disait que tous les artistes vont vers Rome. Et j’apprends récemment que Andrea Camilleri, le si drôle et foisonnant auteur sicilien, s’est installé en fin de vie à Rome, bien sûr, tiens !

Comme le dit l’expression : « Tous les chemins mènent à Rome ! »

 

Trois ouvrages à conseiller :

– Amedeo Modigliani, L’œil intérieur, ouvrage collectif avec des textes de Jeanne-Bathilde Lacourt, Sophie Lévy et Marie-Amélie Senot, constitue le catalogue de l’exposition rétrospective organisée par le LaM – Lille Gallimard / LaM. 2016, avec des essais passionnants.

– Fascinante Italie, de Manet à Picasso 1853 -1917, ouvrage collectif de Blandine Chavanne, Luciano Cheles, Isabelle Julia, Antoinette Le Normand-Romain, Maria Grazia Messina, Angelo Morabito, Cyrille Sciama et de Caterina Zappia, constitue le catalogue de l’exposition organisée au Musée des Beaux-Arts de Nantes, Gallimard, 2009.

– Corot en Italie, La peinture de plein air et la tradition classique, de Peter Galassi, Yale University press, USA / Gallimard 1995, qui cite des dizaines de noms de peintres historiques sur le paysage italien.

 

Bernard Plossu : Roma

Filigranes Editions

Collection Hors Collection

Format 200 x 290

Français

Broché avec rabats

340 photos duotone

320 pages

ISBN : 978-2-35046-483-1

https://www.filigranes.com/en/livre/roma/

 

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