Valérie Jouve – ENSP 1990
Une exposition entre Marseille et Jéricho, non pas comme un point de comparaison, mais comme une conversation entre les images de l’une et celles de l’autre, des villes pour aborder des problématiques plus abstraites de rythme, de lumière et surtout de temporalité. Permettre à l’image d’échapper à la seule reconnaissance, pour nous immerger dans un espace à expérimenter. Toujours cette envie de construire une exposition comme une incarnation idéelle, le montage des images me permet d’établir une relation au spectateur plus physique, dépassant la simple lecture.
Rentrer dans un espace sans aucune nécessité de reconnaissance, de lisibilité et se laisser porter par l’expérience de ce lieu habité par les images, sans connaître la localisation exacte des unes et des autres.
J’ai habité dix ans à Marseille, aujourd’hui j’habite une partie de mon temps à Jéricho ; ces deux villes se posent toutes deux en décalage vis-à-vis des autres villes du territoire, les Français trouvent les Marseillais paresseux, les Palestiniens trouvent les gens de Jéricho trop lents et flegmatiques… Ces deux villes représentent des bulles, Marseille et Jéricho sont à part. La question du pourquoi n’est pas de mon ressort, je ne m’intéresse pas, dans cette exposition, à démontrer, montrer ou analyser mais bien plus faire ressentir ce temps étiré, ces espaces particuliers qui appellent souvent un ailleurs (la mer pour Marseille, le désert pour Jéricho), une ouverture des imaginaires. Ces deux villes me permettent de fabriquer visuellement des utopies possibles. Et le but de cette exposition sera de construire cette utopie spatio-temporelle. La possibilité d’un autre espace, la combinaison des deux villes, comme proposition d’un nouvel espace commun.
C’est aussi l’occasion de montrer à Arles, où j’ai vécu pendant mes études à l’École de photographie, le tout début de mon travail, réalisé à Marseille, la construction des personnages et le travail plus récent réalisé en Palestine.
Valérie Jouve
Née en 1964 à Saint-Étienne.Vit et travaille entre Paris et Jericho. Photographe et cinéaste française, diplômée de l’ENSP, Valérie Jouve a commencé par des études de sociologie avant de se consacrer à la photographie. Le monde urbain est un des thèmes centraux de son travail. Elle capte ses personnages, leurs comportements et saisit cette représentation quotidienne que nous impose la ville, figeant tout ce qui forme son identité. La question du traitement de l’espace est au coeur du sujet : quelle présence la figure confère-t-elle à ce qui l’entoure ? L’architecture intervient comme forme emblématique de l’espace que l’individu se donne pour exister. Le décalage entre conscience collective et individuelle se trouve ainsi posé en termes esthétiques. Ses expositions sont souvent conçues comme des compositions visuelles d’images pourtant saisies indépendamment, à différentes époques. Depuis sa première exposition en 1995 au MAC de Marseille, elle a participé à de nombreuses expositions en Europe et aux États-Unis. Le centre Pompidou lui a consacré une exposition personnelle en 2010 sur les territoires palestiniens. Son premier film Grand Littoral a été présenté dans de nombreux festivals (2003) et a reçu le prix du FID à Marseille. Elle est représentée par la galerie Xippas.