Indissociable de l’Histoire de la photographie, la « street photo » est un genre à part entière depuis ses débuts. Elle séduit aujourd’hui toujours autant amateurs, artistes, collectionneurs et galeristes. Un genre bien défendu par la galerie GADCOLLECTION à Paris.
Avec la pratique de l’atelier en plein air pour les peintres au cours du XIXème siècle (école de Barbizon, impressionnistes…), l’artiste s’est habitué à représenter le motif immédiat qu’il a sous les yeux. Quand apparaît la photographie, se met naturellement en place une peinture de la rue des grandes villes, avec la déambulation quotidienne des flots de passants, le sentiment de dépersonnalisation à l’œuvre dans la métropole ou encore la beauté surgissante d’un certain chaos.
Dès 1877, le Britannique John Thomson, habitué à la photographie de terrain lors de ses voyages en Asie, réalise des portraits des habitants de Londres, s’intéressant en particulier aux petits métiers comme les enfants cireurs de chaussures ou les vendeurs de fruits et légumes ambulants. Il publiera ces photographies sous le nom Street Life in London. En France, quelques années plus tard, Eugène Atget réalise un tableau du Paris ancien, aussi un portrait des travailleurs du menu peuple, dans une quête solitaire et mystérieuse, accentuant l’intérêt des artistes pour la photographie de rue.
« Street opera »
L’Américaine Berenice Abbott, qui découvre le travail de ce dernier aux côtés de Man Ray, s’en inspire. Elle-même montre des tirages au jeune Walker Evans qui est sous le choc. Il dira plus tard qu’Eugène Atget a été sa grande source d’inspiration, lui qui sera aussi un photographe de rue très important.
La « street photo » était née donc, avec une expansion particulièrement américaine ensuite, corollaire de l’avènement des grandes villes, avec la vie des rues, ce qui s’y passe, entre jeux d’enfants et rencontres hasardeuses. C’est ce que nous pouvons voir avec les très élégants clichés en noir et blanc de George Tice, représenté par la galerie GADCOLLECTION. Ces bambins qui marchent sur une immense route des grandes plaines américaines, un chapeau de paille typique des farmers boys sur la tête et la salopette qui va avec… Autres photographies qui surgiront comme un mythe américain : ce drive-in qui évoque le silence effarant d’un tableau d’Edward Hopper ou encore l’immense tête d’aigle juchée en haut du building de Chrysler à New York et qui semble fendre l’air.
Nombreux sont les photographes de rue à avoir plongé dans les artères de la cité new-yorkaise et se sont illustrés en elles au point de devenir des légendes de la photographie : Paul Strand, Robert Frank, Helen Levitt par exemple. Dans les années 2000, c’est la photographe et poétesse Alice Attie, également défendue par la galerie GADCOLLECTION qui réalise une magnifique série sur le quartier d’Harlem. Elle parvient à capter l’humeur d’une douce mélancolie, faisant le portrait des habitants qui s’offrent volontiers à son objectif, les murs derrière eux – briques rouges ou bien couverts de graffitis – qui disent bien l’univers de la ville présent dans son œuvre.
Trafalgar Square
Autre poésie urbaine qui restera dans l’Histoire de la street photo : les clichés subtils de Saul Leiter. Ce dernier réalisant de sublimes tableaux urbains dilués par l’eau de pluie ou l’évanescence d’une trace de buée sur une vitre, offrant comme une clarté neuve à nos yeux fatigués du bitume.
Le photographe français Éric Houdoyer s’inspire des clichés du maître Leiter et joue littéralement avec la lumière qu’il semble voir comme un élément de mise en valeur singulier, traquant ici l’effet du reflet de la fenêtre d’une voiture ou encore la beauté d’un profil anonyme derrière la devanture d’un café. Ses photographies peuvent faire penser à une succession de plans d’un film policier où, à l’instar de l’esthétique du réalisateur Todd Haynes, le photographe traque une certaine douceur dans une noirceur ambiante.
Il serait trop long de citer tous les photographes de rue, mais notons que ce genre de la photo n’a fait que gagner en puissance et ira jusqu’à être la marque de fabrique de certaines associations de photographes, de galeries ou d’agence, comme Magnum fondée notamment par Henri Cartier-Bresson et Robert Capa, portant aujourd’hui des travaux de street photo comme ceux de Raymond Depardon, Miguel Rio Branco ou encore Khalik Allah, le travail de ce dernier même qualifié de « street opera » pour la beauté des visages très expressifs des passants de la nuit illuminés par la ville.
Il est à noter que certains photographes donnent volontiers un aspect plus général et anonyme à l’immensité de la métropole, choisissant plutôt que le portrait détaillé, une certaine vue d’ensemble et tentant de nous faire ainsi sentir l’aspect abyssal de la grande ville, sa construction en forme de fourmilière humaine. Stephen Wilkes, né en 1957, réalise ainsi d’époustouflantes vues de lieux emblématiques, comme le Sacré-Cœur à Paris ou le Trafalgar Square à Londres. Il combine sur la même image toute une série de photographies prises la même journée et donne à voir combien nos espaces urbains sont habités, peuplés d’une animation fulgurante, comme c’est particulièrement le cas à Times Square où les célèbres taxis jaunes ressemblent à un fleuve d’or qui n’en finit pas de couler.
Jean-Baptiste Gauvin
Les artistes suivants cités ci-dessus sont représentés par la galerie GADCOLLECTION : George Tice, Alice Attie, Éric Houdoyer et Stephen Wilkes.
Galerie GADCOLLECTION
4, rue du Pont Louis Philippe 75 004 PARIS
Localisation de la galerie
+33 (0) 1 43 70 72 59
[email protected]
www.gadcollection.com
Du mardi au vendredi, de 14 h à 19 h
Samedi et Dimanche, de 14 h 30 à 19 h