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40 ans de photojournalisme, génération agences, par Michel Setboun et Marie Cousin #3

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Cette image est extraite du troisième livre de Michel Setboun et Marie Cousin sur les agences. Le livre est intitulé 40 ans de photojournalisme, génération agences. 80 photoreporters ont choisi et commentent une image emblématique de leur parcours. L’image que nous publions aujourd’hui est une photographie réalisée par Jane Evelyn Atwood. Toutes les semaines, nous feuilletterons cet ouvrage en publiant une image, sa légende et son texte.

« Je suis fascinée par les mondes clos depuis que j’ai commencé la photographie, à 28 ans. J’ai quitté les États-Unis pour m’installer à Paris en 1971. Je suis employée de bureau, un job sans grand intérêt, mais qui me permet de gagner ma vie pour rester en France. En parallèle, je m’inscris à des cours de tirage et développement. Je commence alors à photographier une prostituée de la rue des Lombards. Lorsque ma première image monte dans le bain, j’accroche immédiatement. Ce sera aussi l’objet de mon premier livre. Des années plus tard — je suis désormais photographe professionnelle —, je m’intéresse au système carcéral. En 1989, le ministère de la Justice m’accorde le droit de visiter la maison d’arrêt de femmes de Toulon. Je suis déçue. J’ai l’impression qu’on m’empêche de voir le “vrai” truc : les prisonniers masculins. Mais une fois de l’autre côté des barreaux, je ne le suis plus. Car je suis choquée par leurs conditions de vie épouvantables et par les raisons pour lesquelles elles atterrissent en prison. À l’époque, personne n’en parle. Je suis ressortie avec une idée fixe en tête : témoigner. Je passe alors dix années à travailler sur les femmes incarcérées, entre l’Europe, d’ouest en est, et les États-Unis, avec ses couloirs de la mort. Cette photo a été prise en 1990 dans un camp de travail obligatoire russe, à la frontière de la Sibérie. Les détenues y fabriquent des uniformes de pompiers pour payer leur emprisonnement. Une fois par jour, elles ont accès au sauna pour la toilette. Mon traducteur, un homme, ne peut pas m’y accompagner. Du coup, je suis seule avec les détenues, sans pouvoir les comprendre. Elles rigolent parce qu’elles trouvent ça drôle que je veuille les photographier nues. Même dans les pires situations, on arrive à créer des moments de joie. »

Propos recueillis par Laurène Daycard.

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