Pour l’année 2012, c’est à l’historien et commissaire d’expositions espagnol Rafael Doctor Roncero d’endosser le rôle de conseiller artistique pour le prix HSBC. C’est à lui qu’incombe la préselection des 12 dossiers afin de choisir les deux lauréats. Cette année là, se sont la jeune photographe britannique Leonora Hamill et le français Eric Pillot qui remportent l’édition du Prix HSBC pour la Photographie ! Aujourd’hui, pour ce nouvel épisode, nous avons interrogé les deux lauréats sur leur expérience vécue il y a 3 ans.
L’Oeil de la Photographie : Le prix HSBC pour la Photographie fête ses 20 ans. Il est remis chaque année à deux artistes pour les aider à développer un projet et fait l’objet d’une exposition et d’une monographie, souvent la première. Comment avez-vous vécu cette expérience ?
Leonora Hamill : J’ai eu une expérience extrêmement positive, à la fois au niveau professionnel et au niveau humain. Je me suis très bien entendue avec mon co-lauréat Eric Pillot et j’ai vraiment apprécié le fait de passer tant de temps avec l’équipe HSBC. Tout le monde nous a soutenus avec enthousiasme et j’ai l’impression d’avoir profité de chaque instant.
LODLP : Pouvez vous nous parler du projet que vous avez présenté? Quel impact le prix a-t-il eu sur votre vie artistique ?
L. H. : Art in Progress s’inspire des écoles d’art en Europe, en Asie, en Afrique et dans les Amériques. La série, qui a débuté en 2009, consiste en des images des ateliers où les étudiants travaillent. Prises avec une chambre et tirées analogiquement, mes images sont intentionnellement détaillées, frontales et neutres. J’ai une certaine manière de me confronter au réel et cela est véhiculé par des images frontales et par une esthétique froide qui offre au spectateur la possibilité de naviguer visuellement dans un espace simultanément contemplatif et dynamique. Malgré leur absence, les étudiants demeurent présents dans les espaces qu’ils occupent, dans les outils dont ils se servent et dans les œuvres qu’ils sont en train de créer. Ces espaces sont caractérisés par une importante énergie collective. Les objets qui sont éparpillés à travers ces ateliers appartiennent souvent au canon occidental de l’histoire de l’art et constituent une toile de références croisées agissant comme un mécanisme unificateur dans la série. De Saigon à Saint Pétersbourg, de Bombay à New Haven, les ateliers regroupent à la fois la présence des étudiants, le passage du temps et la production d’art, créant ainsi un espace intensément stratifié.
Le prix a eu un impact énorme sur ma carrière. Il a en quelque sorte légitimisé ma pratique artistique aux yeux des autres. Il m’a également donné beaucoup de couverture médiatique et je suis fière de faire partie de la famille des lauréats du Prix HSBC.
LODLP : Comment HSBC vous a-t-elle accompagnée tout au long de cette aventure? et aujourd’hui, quels sont vos rapports ?
L. H. : HSBC m’ont beaucoup soutenue. Ils ont été très respectueux par rapport à mon processus de production, me permettant ainsi de réaliser l’exposition itinérante dans les meilleures conditions possibles. Ils ont été rigoureux avec la publication et nous ont donné l’occasion d’être présents au cours de l’impression, ce qui nous a donné le type de contrôle sur le résultat final dont reve chaque photographe. Des liens se sont créés en passant du temps ensemble pendant une année entière, et jusqu’à ce jour un certain degré de loyauté demeure.
“Ce genre de travail est un vaste exercice de catalogage des espaces construits ou habités par les hommes. Une étude de la condition humaine à travers une typologie concrète de ses espaces : les écoles d’art et leurs studios d’artistes. Au cours de plusieurs années et tout autour du monde, Leonora Hamill a photographié tous ces endroits où les gens apprennent l’art de façon différente. Parcourir ces studios ne suffit pas à montrer la particulière façon d’interpréter qu’adoptera l’artiste dans le futur de la société dans laquelle il vit. Dans ce travail prédomine par ailleurs le caractère collectif du labeur artistique dans son étape de formation, ce qui l’oppose à l’idée généralisée qui veut que l’artiste soit un être isolé et indépendant. Il s’agit sans doute d’un grand travail, auquel s’ajoute une importante charge sociologique, et où l’on perçoit la recherche d’une esthétique froide capable de présenter de la manière la plus directe ces espaces habituellement surchargés d’éléments et de formes.”
Rafael Doctor Roncero, Conseiller Artistique 2012
LIVRE
Art in Progress
Leonora Hamill
Actes Sud / Prix HSBC pour la Photographie
Sortie en Juillet, 2012
22,0 x 28,0 / 104 pages
ISBN 978-2-330-00997-7
20,00€