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Edouard Baldus : faux monnayeur talentueux, photographe consacré, héliograveur méconnu 

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La découverte d’un ensemble de 83 plaques de photogravure, vendues aux enchères le 16 juin prochain, révèle le destin génial d’Édouard Baldus, peintre et photographe prussien du XIXe siècle, naturalisé français, faux monnayeur recherché à Cologne et photographe consacré à Paris, dont l’œuvre héliographique reste méconnue. Une belle sélection de photographies sur papier salé et sur papier albuminé des années 1850 accompagne cette étonnante découverte.

Édouard Baldus fut, selon un imprimé de 1835 récemment découvert, sous le coup d’un avis de recherche dans la région de Cologne pour fabrication de fausse monnaie. Un destin digne de celui d’un héros de roman, qui appelait le photographe de renom à faire de ce crime punissable de la peine capitale l’origine secrète d’une vie d’invention de soi, mais aussi celle de l’invention photographique d’une vie.

L’avis de recherche rédigé par le juge des Investigations Royales Ludowigs à Cologne le 16 février 1835 stipulait : « L’ancien bombardier Edouard Baldus, né à Grünebach, dans le Comté de Altenkirchen, Province de Coblence, résidant récemment à Cologne, qui est accusé de fabrication et d’usage de faux billets, a pris la fuite pour échapper à cette investigation. D’après le signalement suivant, je demande aux autorités policières de rechercher cet homme, de l’arrêter, et de l’écrouer avant moi ».

L’auteur Peter Lindlein, qui a écrit l’ouvrage The Secret of Edouard Baldus explique : « Nous croyons que ces accusations sont vraies. Baldus avait déjà découvert à cette époque à Cologne son talent pour faire de l’argent en créant des images, mais au sens très littéral du terme. Il acquiert ici sa première expérience pratique en matière de technique d’impression avec le “Kassenanweisungen”, papier monnaie introduit en Prusse en 1821 ».

« La découverte de cet avis de recherche de 1835 rend la personnalité de Baldus fascinante », commente quant à lui l’expert Serge Plantureux. « Le fait que Baldus ait été fort mystérieux sur le lieu et la date de sa naissance, qu’il n’ait, semble-t-il, jamais cherché à retourner dans les principautés allemandes, que l’authenticité de l’avis de recherche ne puisse guère être mis en doute, que la description physique concorde parfaitement, conduira certainement les historiens de la photographie à reconsidérer la biographie du célèbre photographe et les écrivains contemporains à le transformer en héros de roman. La découverte de cet ensemble de plaques de photogravure ne fait que renforcer cette nouvelle identification de Baldus. Elle invite à reconsidérer son œuvre héliographique ».

À l’heure où se dévoile l’étonnante biographie de ce grand photographe que l’on pensait être un personnage plutôt conventionnel, l’hommage à Baldus (1813-1889) dans une vente aux enchères le 16 juin 2017 à Drouot (Paris) promet de retenir l’attention des institutions, des historiens et des collectionneurs.

Aux côtés de cet ensemble surprenant, une vingtaine de photographies sur papier salé et sur papier albuminé, ainsi qu’un album, illustrent le parcours bien plus officiel d’Édouard Baldus tel qu’il fut consacré dans les années 1850 et que le XXe siècle l’installa dans l’Histoire de la photographie. Celui d’un peintre, qui dira avoir exposé à Antwerp et s’être fait connaître aux États-Unis comme portraitiste itinérant, avant d’arriver à Paris en 1838. Celui d’un artiste inconnu, qui pendant dix ans essuiera les refus du Salon, avant de réaliser ses premiers clichés et de connaître le succès d’une décennie de commandes, de la Mission héliographique (1851), aux Chemins de fer de Paris à Lyon et à la Méditerranée (1861). Celui d’un grand photographe de la modernité, dont l’histoire est à venir.

La découverte récente de cet ensemble de plaques de photogravure constitue un apport précieux pour la réception de l’œuvre de Baldus et pour l’Histoire de la photographie. D’une part, elle renforce l’identification du photographe consacré qui poussa ce procédé de reproduction photomécanique à son raffinement le plus extrême, avec le jeune artiste, astucieux mais hors-la-loi, qui réussit à placer de faux billets certainement fort bien imités. En ce sens, elle révèle que la photogravure ne fut pas pour Baldus une activité secondaire et tardive, mais une activité première, sans doute primordiale. D’autre part, elle recèle la clef d’un problème scientifique ancien, celui de la reproduction des demies-teintes, qui traverse l’histoire de la photographie et sur lequel se pencheront d’autres pionniers avec moins de succès que Baldus, qui n’en révèlera jamais la formule.

Jusqu’à la découverte de ce rarissime ensemble, dans lequel la ville de Paris et ses monuments aujourd’hui historiques sont à l’honneur, seules quatre plaques de photogravure signées Édouard Baldus étaient connues. Ironie du destin, l’art de la photogravure si bien partagé par le faux monnayeur prussien et l’héliograveur français, fera la fortune de l’un comme la faillite de l’autre. Tout aussi secrète que le fut celle du jeune artilleur Édouard Baldus, l’histoire du photograveur ne dira presque rien de l’identité de ses créanciers, de la nature de ses dettes et des dernières années de sa vie.

 

Baldus Secret
Vente chez Drouot Richelieu le 16 juin 2017 à 14h
9, rue Drouot- Salle 11
75009 Paris
France

Catalogue complet :

http://www.copages-auction.com/html/index.jsp?id=82632&lng=fr&npp=150

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