Les Héliotropes
Laurent Villeret / Dolce Vita
À l’origine, il y a le voyage.
Il y a l’envie réflexe de rendre compte, mais pas seulement.
Il y a l’envie aussi de réciter le voyage dans une grammaire nouvelle, écrire bien plus que transcrire. Telle est la mesure du défi photographique.
L’alchimie
Il y a le désir du photographe, trouvant son objet par la grâce d’une technologie perdue, une chimie du siècle dernier : le Polaroïd.
Il y a les essais et le calage d’une graphie unique, une fleur nouvelle aux teintes désuètes, imaginée comme une estampe.
Le photographe
Pour lui, il y a l’Inde en 2002 et les premiers transferts, d’autres voyages encore et la maturité, une douce maîtrise, acquise au gré du temps. Sur la route mexicaine entre deux océans, la pratique s’est révélée, définitivement liée à ses errances.
Le titre arrive, presque naturellement : Héliotropes, plantes obsessionnelles dont les feuilles suivent la course du soleil.
Il ne se laisse pas aller à l’accumulation des souvenirs. Le rythme contraint de la technique choisie lui permet de faire ce choix-là. Il y a sa décision et l’envie folle de capter l’évanescence des choses, indéfinissable autrement que par ce procédé.
Le paysage se veut sensible et mental. Seule compte la géographie du photographe.
Il y a la grâce du hasard, une transfiguration de l’image, ou rien. Il y a la perte toujours possible et le choix difficile mais sans concession du photographe.
Et la fin?
Car il y a une fin prévue à cette histoire. Par la force des choses, le dernier Polaroïd marquera le point final de l’aventure.
Il y a de luxueux objets, étrangement photographiques, des petits cailloux précieux semés là comme autant de jalons, qui nous mènerons ? au bout du voyage.
Au bout du compte demeure à nos yeux le don des Héliotropes.
Fabien Vernois