Le photographe Xavier Roy est grand et blond : pas facile de passer inaperçu en voyageant dans les pays lointains… Mais il arrive à s’intégrer dans le rythme du monde car il est rapide et alerte dans sa manière de photographier, tout en prenant l’air de « flâner » ! Le photographe n’est pas pour autant juste un flâneur : il fixe les moments de la vie qui ont l’air sans trop d’importance et il leur donne leur âme. li est ainsi en plein accord avec le présent, le réel et les moments vécus, où qu’il soit. Xavier Roy est bien l’un de ces photographes présents et vifs. La photo est sa passion, et il s’y est investi avec fougue, tendresse, et rigueur, comme une deuxième vie où l’œil et l’intelligence permettent de vivre intensément en regardant attentivement ce qui se passe autour de soi. Roy voyage, beaucoup, loin, du Brésil à l’Égypte et dans tant de pays : des pays qu’il comprend en les regardant passionnément. La photographie est si sincère ! Ce n’est pas que l’art de l’émerveillement, c’est aussi l’art de vivre de plein-pied avec la vie autour de soi. En anglais, on dit « to be involved », c’est-à-dire s’impliquer.
Roy photographie beaucoup les gens dans ses voyages. Les enfants aussi. Il doit sûrement être vu, même s’il passe furtivement, mais il sait être avec ceux qu’il photographie en les saisissant dans la vie de tous les jours, avec le ton juste. Il n’interprète pas leur vie, il nous les fait partager. Je sais que le terme »humaniste » est un peu galvaudé en photographie maintenant…
Certes, mais n’oublions pas que cet humanisme était un véritable engagement pour Boubat, Burri, Nicolas Bouvier, Riboud et d’autres grands voyageurs. La photographie doit, par sa forme moderne, parler des gens sans déborder dans l’émotionnel, mais au contraire avec une réserve montrant bien qu’elle n’est pas là pour épater mais pour partager !
Tôt le matin, Roy passe le long d’un fleuve où des gens font leurs dévotions, ou alors il est dans une rue d’un village tropical où il ne se passe apparemment rien. li photographie avec la rigueur poétique du noir et blanc, qui est une forme de vérité visuelle encore et toujours si propice à l’imaginaire!
ll partage avec nous ces moments, calmement, avec un doux ravissement qui nous permet d’être des spectateurs non pas de la télévision banalisée, mais du déroulement de la vie dans ce qu’elle a de plus vrai à nous offrir : ainsi nous sommes à ses côtés des spectateurs actifs, et sentons, entendons, voyons ce qui se passe tout autour de lui, de nous… La photographie dont Boubat disait si bien : « Image = magie ».
Bernard Plossu
Ce portfolio a été publié dans le numéro de Réponses Photo n°265 Spécial Henri Cartier-Bresson en avril 2014.