Le Prix Canon de la femme photojournaliste vient d’annoncer le nom de sa quatorzième lauréate. Il s’agit de Viviane Dalles, jeune photographe française de 36 ans. L’appel à candidature clôturé le 26 mai dernier a réuni plus de 90 participantes venant de 26 pays différents. Soutenu par le magazine ELLE, le prix, doté de 8 000 €, vise à soutenir une femme photographe dans la réalisation d’un projet de reportage.
Viviane Dalles va donc pouvoir réaliser son projet sur les mères adolescentes dans le nord de la France. Ce travail sera exposé lors du festival Visa pour l’Image – Perpignan en 2015. Cette année, nous y découvrirons le travail de la précédente lauréate, Mary F. Calvert, sur les agressions sexuelles dans l’armée américaine.
Rencontre avec la lauréate.
Tu as déjà reçu plusieurs bourses et prix, que représente pour toi ce Prix Canon de la femme photojournaliste ?
Viviane Dalles: Etre la lauréate du Prix Canon de la femme photojournaliste est un grand honneur. Pour être sincère, ce sujet me tient profondément à cœur et sans ce prix, je n’aurais pas été en mesure de le financer, car il va me demander beaucoup de temps sur place.
Peux-tu nous parler du projet que tu as proposé pour le Prix sur les mères adolescentes dans le nord de la France ?
V. D. : Le projet photographique que j’ai proposé pour ce Prix porte sur des adolescentes qui sont nées dans le nord de la France, région fortement touchée par le chomâge. Cependant leur avenir est déjà tout tracé : elles ne sont encore que des adolescentes et rêvent de devenir mères le plus rapidement possible.
J’ai choisi ce sujet parce qu’il me touche. Parce que je trouve incroyable que ces jeunes filles qui sortent à peine de l’enfance souhaitent donner la vie, pour être reconnues par la société, cette même société qui ne leur offre pas d’avenir. En allant à leur rencontre, je souhaite tenter de comprendre leur position, leur choix, capter l’atmosphère dans laquelle elles vivent. Ce n’est pas uniquement un sujet sur des mères adolescentes : je veux remettre en contexte leur situation afin de dépeindre un fait de société, car c’est bien de celal qu’il s’agit.
Cela fait longtemps que je veux réaliser des sujets en France, c’est aussi pour cela que il y a deux ans, je suis rentrée après avoir vécu sept ans à l’étranger. J’éprouve aujourd’hui le besoin de développer de nouveau sujets de fonds qui touchent la société dans laquelle j’ai grandi.
Compte tenu du contexte économique de la presse, les prix sont-ils devenus, aujourd’hui, l’un des seuls moyens pour produire ses reportages ? Comment se finance la production de tes sujets ?
V. D. : Les prix et les bourses ont toujours été importants pour que les photographes puissent avancer dans leur travail. C’est triste et frustrant (tant pour eux que pour nous, les photographes) que les magazines aient de plus en plus de mal à pouvoir envoyer des photographes sur le terrain ; cela reflète bien les difficultés que traversent la profession. Ainsi, aujourd’hui, les prix aparaissent presque comme l’un des seuls moyens pour travailler sur le long terme — l’autre étant l’auto-financement que je connais très bien pour le pratiquer parallèlement depuis des années !!
Isabelle Fougère, Brigitte Huard et Lizzie Sadin ont essuyé de nombreuses critiques sur la création de ce prix, jugé trop féministe. Quel est ton avis à ce sujet ? Penses-tu que les femmes photographes souffrent d’un certain sexisme dans la profession ?
V. D. : Il m’est difficile de juger le fait que certains aient pu porter de telles critiques. Pour ma part, et je parle en tant que femme photographe, je leur suis reconnaissante d’avoir mené cette aventure aux côtés de Canon France et Visa pour l’image pendant de nombreuses années. Nous les photographes avons besoin de soutien, de financements de la part des professionnels de l’image. Et puis le sujet que je présente n’est absolument pas féministe !
Quant à savoir si nous, les femmes photographes nous souffrons d’un certain sexisme, que te dire… Non. Et la question m’ennuie… C’est un métier difficile certes, mais je n’ai jamais eu l’impression qu’être une femme soit un désavantage ! Parlons plutôt photographie et actualité, le vif du sujet après tout !!
Nous te retrouverons en 2015 à Perpignan, quelles sont tes actualités à court et moyen terme ?
V. D. : En ce qui concerne mon actualité, je travaille en France et essentiellement sur Paris où je réponds à des commandes (presse, édition, institutions). Je suis impatiente de partir commencer mon sujet dans le nord de la France, d’ailleurs mon esprit y est déjà !!
Aujourd’hui, nous publions le dernier sujet de Viviane Dalles intitulé Boxing Tent et réalisé en Autralie entre 2011 et 2013. Elle a suivi Michael Karaitiana, le petit-fils de Roy Bell’s, l’un des premiers à faire vivre le spectacle original de la boxing troupe, tente traditionnelle de boxe ambulante, qui était en vogue au XXe siècle en Australie. Aujourd’hui, Michael est le dernier sur le continent à arpenter les routes du désert. Il porte ainsi la tradition de la boxe comme une fierté personnelle et pudique, car la boxing troupe, c’est plus que des combats, c’est une histoire de famille, c’est la mémoire des Bell’s.
FESTIVAL
Visa pour l’image – Perpignan
Du 30 août au 14 septembre 2014
Prix Canon de la femme photojournaliste
Mary F. Calvert
Couvent des Minimes
66000 Perpignan
France
http://www.visapourlimage.com
http://www.vivianedalles.com
http://www.signatures-photographies.com