Backroom. Lieu présent dans certains bars gays, où les consommateurs peuvent se rencontrer dans la pénombre ou l’obscurité pour avoir des relations sexuelles sans pour autant se déshabiller. La backroom également appelé darkroom, peut être aménagé en labyrinthe et petits compartiments agrémentés par- fois d’un « glory hole » (orifice circulaire mural). Certains Sex shop, sont aussi équipés de ces pièces. Mais que sont-elles vraiment? Se limitent-elles à des défouloirs charnels où l’on viendrait dans l’unique but d’assouvir ses pulsions? Ce labyrinthe a priori exigu et sombre peut-il mener à la volupté ? Que vient-on chercher dans ces endroits pourtant aux antipodes du plaisir traditionnellement défini? De la Grèce antique – avec les célèbres descriptions de banquets offertes par Platon – à nos jours, ce que nous appelons aujourd’hui les backrooms ne semblent jamais avoir cessé d’exister ; sous des noms différents, plus ou moins visibles ou plus ou moins acceptés mais toujours dans l’ombre des différentes sociétés. Le constat apparaît alors évident : notre époque n’a pas créé ses lieux, ils ont traversé les années et leur existence encore aujourd’hui prouve qu’ils ont toujours réussi à survivre. Pourtant, la religion – au nom des « bonnes moeurs » – a longtemps tenté de borner les pratiques sexuelles, les réduisant ainsi à des fins procréatrices dans un cadre hétérosexuel normatif – ayant donc pour unique lieu d’expression le lit conjugal. Emprisonnés dans cette définition restreinte du plaisir, ces lieux ne pouvaient alors disposer que d’une existence dissimulée notamment pour la communauté gay fortement marginalisée. Les années d’après guerre et les vents de libertés qui ont soufflé ont permis une certaine démocratisation de notre vision du sexe – peut être alors plus décomplexée. Mais une idée persiste : la vision de la sexualité reste encore aujourd’hui définie par la société au travers notamment des médias et de la publicité. Ainsi la vulgarisation de la pornographie au travers des images véhiculées par le petit écran, Internet…etc, n’a cessé d’engendrer des pulsions et de créer de nouveaux désirs qui, lorsqu’ils ne sont pas réalisables, deviennent source intarissable de frustration. C’est alors qu’entrent en scène les backrooms : des hommes y viennent pour rassasier, apaiser satisfaire un désir. Mais peut-être est-il nécessaire alors de dépasser la vision sordide de ces lieux pour y entrevoir la véritable essence de leur existence… Ces backroom seraient alors le théâtre de multiples paradoxes qui les rendent fondamentalement énigmatiques. Le sexe rencontre l’obscurité et le lugubre, pouvant entrainer l’oubli et le plaisir ; mais quels que soient leur dessein, quelles que soient les intentions de ceux qui franchissent leur porte, ces lieux sont accompagnés d’une profonde liberté. Et la vision, les pratiques et la définition de la sexualité ne doit-elle pas être le parfait reflet de cette liberté ? Ce travail photographique n’a pas pour but de tirer le portrait de ces hommes venus passer un moment en ces lieux. Il ne blâme pas leur comportement plus qu’il n’en fait d’ailleurs le procès, il a pour unique intention de constater une réalité très peu évoquée. Vincent Couderc
L'accès à ce contenu est réservé exclusivement à nos abonnés. Si vous êtes déjà membre, vous pouvez vous connecter ci-dessous.
Abonnez-vous aux archives pour un accès complet à L’Œil de la Photographie !
Ce sont des milliers d’images et d’articles, documentant l’histoire de la photographie et son évolution au cours des dernières décennies, à travers un journal quotidien unique. Explorez comment la photographie, en tant qu’art et phénomène social, continue de définir notre expérience du monde.
Deux offres sont disponibles. Abonnez-vous à l’offre sans engagement pour 8 € par mois ou à l’offre à l’année pour 79 € (2 mois offerts).