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Trisha Ziff –La valise mexicaine

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Trisha Ziff est une réalisatrice anglaise qui vit et travaille au Mexique. Conservatrice en photographie contemporaine, elle vient de terminer un documentaire sur la valise mexicaine de Capa, en parallèle avec la grande exposition. Motivée avant tout par le fait de restituer l’histoire d’Espagne à ses citoyens, elle a tourné en Europe et en Amérique pour retracer chronologiquement l’incroyable voyage des négatifs de la guerre civile ibérique. Capa, Taro et Chim, combattant du fascisme par la photographie, sont connus pour avoir été partisans de la révolution républicaine. Trisha Ziff aborde largement le contexte dans lequel leurs photos ont été prises et ont parcouru le monde, jusqu’au Mexique, à l’époque le seul pays à ouvrir ses frontières aux réfugiés républicains. Elle est celle qui a permis la restauration des négatifs à l’ICP et transporté la valise mexicaine jusqu’à New York en 2007. Critiquée pour ne pas avoir « assez » parlé des documents et de Robert Capa, Trisha Ziff livre depuis Mexico City ses sentiments et informe sur le contenu du film, présenté en avant première mondiale à Arles.

Trisha, est-il possible de simplement nous expliquer ce que votre film traite et de quelle façon ?
C’est un film d’une heure et demi. Bien que son titre soit La Valise Mexicaine, on y découvre trois histoires. La première est celle du voyage des négatifs de Capa, Taro et Chim, d’Espagne en France puis Mexique, où ils ont été retrouvés 70 ans après leur naissance, jusqu’à New York, où il ont été exposés. Le film montre évidemment ces photographies et des images des valises. La deuxième est celle des dissidents républicains exilés au Mexique après la fin de la guerre d’Espagne. Cette partie est très importante car ce pays était le seul à leur ouvrir ses frontières. On y découvre des interviews de quatre générations de réfugiés. C’est aussi pour cela que la valise mexicaine porte ce nom : elle est la mémoire de ces gens et devient le symbole du rôle du Mexique à cette époque. La troisième est celle du passé restitué des citoyens espagnols. Elle parle du droit qu’ils ont de découvrir les images d’un épisode majeur de leur histoire et de déterrer ces images de leurs ancêtres, quarante après la mort de Franco. J’étais plus intéressé par traiter le contexte et l’aventure commune de ces documents et des hommes qui figurent sur ces images que de faire un film sur les trois photographes. Mon documentaire fait donc le parallèle entre l’histoire d’Espagne, celle de l’exil de ses combattants et les photographies. C’est un film qui comporte un grand intérêt politique en corrélation avec les démarches, en Espagne, du magistrat Baltasar Garzon.

Combien de temps vous a-t-il fallu pour nous livrer ce film ?
Je suis le projet depuis longtemps mais un peu plus de deux ans m’a seulement suffit pour tout filmer. Cela a été rapide.

Vous montrez donc des images tournées aux quatre coins du monde ?
Oui, comme la valise, j’ai suivi l’itinéraire Espagne-France-Mexique-Etats-Unis.

Par ailleurs, vous avez retrouvé des images d’un moment assez particulier…
J’ai en effet par chance mis la main sur des images de l’infirmière qui a soigné Gerda Taro avant que la photographe décède. Elle raconte comment Gerda a quémandé son appareil photo alors qu’elle était en train de mourir. C’est la seule séquence du film que je n’ai pas personnellement filmé.

Vous avez donc découvert les photographies de Capa, Taro et Chim au Mexique ?
Oui, je les ai personnellement transportés jusqu’à l’ICP de New York.

Que nous apporte-t-il de plus, dans votre film, que l’exposition en elle même ?
L’exposition parle des négatifs et des photographes mais que trop peu du contexte. Nous n’y apprenons pas l’origine du nom de la valise mexicaine, par exemple. Dans le catalogue non plus. J’en suis un peu contrariée malgré le grand intérêt des recherches et installations de l’ICP.

C’est aussi au Mexique que vous avez rencontré Ben Tarver, l’homme qui a hérité de la valise mexicaine ?
Evidemment, je suis la seule à l’avoir vraiment rencontré et j’ai négocié avec lui pour qu’il restitue les négatifs à l’ICP. Le musée a aussi quelque peu oublié Ben Tarver. Dans le film, on le voit témoigner, on découvre la maison modeste où il vit, sa personnalité timide et presque inconfortable devant une caméra. Il raconte l’histoire de sa famille et comment, presque accidentellement, il est devenu le propriétaire de ses images par l’intermédiaire de l’une de ses tantes. Il parle aussi du général Aguilar, qui a emmené les négatifs au Mexique.

Après les avoir découverts en 1995, pourquoi Ben Tarver a-t-il mis autant de temps pour rendre la valise mexicaine à ses propriétaires légitimes ?
Je pense que la question que tout le monde devrait se poser est plutôt : Pourquoi l’ICP a-t-il mis autant de temps pour récupérer les négatifs ? Le musée savait M. Tarver en leur possession depuis 1995, date à laquelle il a écrit à ses conservateurs. Pourquoi l’ICP a mis 14 ans avant de récupérer les photographies ? Pourquoi l’ICP n’a-t-il pas mis quelqu’un dans un avion pour le rencontrer à Mexico City? Ben Tarver est américain et parle anglais, et Mexico City est à 4h30 de vol de New York.

Propos recueillis par Jonas Cuénin

La Valise Mexicaine
Film de Trisha Ziff, couleur et haute définition, 86min.
Projeté en avant première aux Théâtre Antique d’Arles le 5 juillet 2011 à 22h30

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