« Pendant 9 ans, j’ai enseigné la Photographie dans le New Jersey. En 2008, j’ai décidé de prendre la voie du photojournalisme. Suivant mon instinct, je suis partie pour La Havane en juillet 2009, afin de faire un documentaire sur le groupe de métal cubain Escape, qui devait faire face au départ imminent de leur claviériste Jennifer Hernandez, qui partait aux Etats-Unis rejoindre son père.
Ayant grandit dans une famille monoparentale où l’incertitude économique était monnaie courante, en découvrant l’heavy metal j’ai trouvé la force de me battre contre tout ce qui me terassait. Manifeste de liberté individuelle, l’heavy metal est furieux, passionné. A l’âge de 14 ans, j’y ai trouvé un échapatoire. La nature rebelle du métal elle-même m’a beaucoup politisé.
Des années plus tard je me retrouvais à La Havane, touchée comme la plupart des américains, par la beauté des gens et leur passion pour la musique. J’étais au point de rencontre avec les “frikis” [bizarres] ou “métaleux” mais, dans ma supériorité américaine, je me voyait comme diplomé d’une culture petite-bourgeoise; j’ai écouté du jazz qui était beaucoup plus révolutionnaire. Je ne me suis pas rendue compte que ces jeunes hommes et femmes faisaient, ce qu’ils expérimentaient et combien il étaient courageux en jouant ce qui était pointée comme étant “la musique de l’ennemi”.
Cette série est axé sur Alejandro Padron, le batteur du groupe Escape. Il est, sans aucun doutes, le premier batteur de métal de toute l’île. En vivant à Cuba, particulièrement en tant que “métalleux bizarre” cubain, Alajandro n’a aucun avenir. Son groupe a été appouvé par l’agence Rock de l’état et il a obtenu un contrat pour jouer en première partie à Maxim (première et unique salle de métal) une fois par mois. Cependant, quitter l’île pour une tournée ou avoir l’opportunité de diffuser leur musique à l’extérieur de Cuba semble illusoire.
Alejandro vit avec son père, son frère qui est handicapé, la mère de son fils Jeanysan et son fils Jorgito. Sa mère est décédée en 2005 et son père, Julian, ne l’a toujours pas oubliée. Jeanysan, gère les finances de la maison en s’offrant aux étrangers, afin de subvenir aux besoins de la famille. La pression d’élever un enfant sans la capacité de pouvoir offrir une réelle vie de famille, ainsi que le contrôle extérieur de l’état laissent peu de place à Alejandro pour respirer.
En observant et photographiant Alejandro – figure emblématique du rock and roll et bad boy – il y a une différence notable entre la personne qu’il est en se réveillant et la personne qu’il devient lorsqu’il trouve la paix, derrière sa batterie, au sein du groupe d’heavy metal. »
Tracey Noelle Luz est Irlando-Américaine. Agée de 38 ans, elle vit aux Etats-Unis à Jersey City.
Portfolio week-end sélectionné par Olga Sviblova.