A l’occasion de la sortie du documentaire de Sebastian Junger sur la vie de Tim Hetherington, l’ICP présente une exposition du photographe sur les murs vitrés de l’école. De Tim Hetherington, tous s’accordaient sur l’empathie et l’engagement et la série exposée rend hommage à cette sensibilité : accompagnant les troupes américaines en Afghanistan, Tim Hetherington révèle leur fragilité en photographiant les soldats abandonnés au sommeil. Au vu de l’effet, sensible et direct, la démarche semble évidente, pourtant Sebastian Junger témoigne dans le documentaire de son incompréhension quand, ouvrant les yeux à 5 heures du matin dans une base, il a aperçu Tim en train de photographier les soldats endormis. Le sommeil, cet état d’abandon que plusieurs photographes ont pris comme métaphore de l’enfance, cet état où la perte de contrôle est totale, cette condition de relâchement contraire aux conditions de combat, cette situation intime par excellence. Pour toute ces raisons, la série reflète subtilement l’humanité de Tim Hetherington, son langage suggestif et sa compréhension de l’impact de l’image. De la guerre, qu’il a couvert pendant plus de 10 ans, il n’a rapporté que peu d’images explicites, exprimant la violence par les traces indélébiles qu’elle laisse sur la population, l’environnement et les objets davantage que sa réalité immédiate. Ses soldats, imprimés en grand format pour l’occasion, reposant grandeur nature à la vue de tous les passants de la place Grace, évoque aussi directement le rapport d’Hetherington aux autres, sa capacité à remplacer chez son sujet la pudeur par la confiance. Cette relation, on ne la lit pas dans les yeux des soldats, clos pour l’occasion, on la déduit de leur consentement à exposer publiquement leur vulnérabilité. La lumière ajoute à la délicatesse de la série, au flash et pourtant chaude, dominée par des jaunes apaisants comme ce repos. Ce traitement donne une réalité aux images que la scénographie accentue : les images sont exposées les unes au-dessus des autres, en format quasiment réel, donnant l’impression au visiteur de longer les lits superposés des étroites chambres militaires. De nuit, l’effet est d’autant plus touchant.
Laurence Cornet
Tim Hetherington Sleeping Soldiers
Jusqu’au 13 mai 2013
ICP
1114 Avenue of the Americas au niveau de 43rd Street
New York
USA