Incompris des citoyens provenant des terres et des montagnes, les populations côtières ont besoin d’être bercées par le rythme des marées jours et nuits. Chaque marée montante réconforte les sentiments et chaque marée descendante, dans sa chute, laisse apparaitre des résidus, métaphores des questionnements les plus sombres. Ceux-ci se transforment alors en fragments sous l’œil d’une photographie volontairement esthétisante.
Cet apaisement que me confère l’interface maritime a été mon point de départ, c’est là généralement que j’y dissout mes peines. J’explore les parcelles littorales françaises, dans l’optique de collecter et de réunir une typologie du réel. Morceler tous ses éléments en exacerbant leurs formes, au point de les rendre abstraites, pour les faire surgir et les rendre autonomes.
Les motifs se révèlent généralement aux couchers de soleil : j’attends une lumière propice qui fera ressortir de surprenants détails et inspirer mes prises de vue. Avec un contraste et une mise au point assumée, je joue sur la saturation. Je recherche également les ombres mais surtout l’émotion. Originaux, les résultats m’étonnent, puis m’incitent à travailler « l’énigme » par mes angles de vue.
La série joue alors sur l’ambiguïté du regard, à la fois proche, sans percevoir exactement l’origine de la forme et à la fois plus lointain, faisant appel à notre imaginaire. Ces motifs sont emprisonnés par l’envahissement de l’image. Le spectateur laisse ainsi sa perception prendre le relais. On pourrait alors apercevoir, une carte, une gravure, un paysage lunaire, des reliefs montagneux… Comme pour dévoiler chaque parcelle cachée qui caractérise un ensemble bien plus vaste.
Ces photographies sont les traces d’une mémoire collective. A la manière d’un puzzle ou d’un jeu de memory, elles font appellent à la ritournelle de chacun. Mêlant intrigue, sensibilité et curiosité, cette série ainsi permet aux regards de s’identifier.
Thomas Girondel