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The Beats and The Vanities, Larry Fink chez Armani/Silos

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Les années 60 et 90, face à face, dévoilent leurs atmosphères respectives grâce aux images hors normes de Larry Fink exposées à Armani/Silos à Milan (et c’est la première fois que les lieux accueillent une exposition dédiée à un seul artiste). The Beats et The Vanities nous procurent un aperçu assez excitant de la vision personnelle du photographe et nous permet d’apprécier son sens de « l’empathie sensuelle ».

« Je suis dans un état perpétuellement viscéral […] Cela signifie que je veux toucher tout ce que j’aime », explique Fink, et on sent ce tempérament à travers ses photos les plus anciennes du livre The Beats (54 images) et dans celles de The Vanities (71 images), plus récent. Le photographe nous soumet une rétrospective de deux décennies très différentes du siècle passé à travers 125 tirages originaux en noir et blanc. Bien que les deux séries aient déjà figuré au programme d’expositions internationales et de salons de la photographie, c’est la première fois qu’elles sont rassemblées. « Je suis vraiment ravi de présenter le travail de Larry Fink à Milan », s’est félicité Giorgio Armani. « Je trouve que son talent pour saisir les ombres et les lumières, les formes et les lignes, de manière si fluide, c’est une qualité que je comprends particulièrement bien en tant que styliste ».

L’exposition nous donne l’occasion de découvrir son style unique et orignal de reportage empathique, à travers deux séries de photos. À la fin des années 50, Fink, âgé de 17 ans, habitait à Greenwich Village et il a très vite été attiré par la contre-culture new-yorkaise. Il a fait la connaissance d’un groupe de musiciens et d’artistes liés au mouvement beatnik finissant. Ayant lui-même rejoint le mouvement, Larry Fink a participé à des manifestations contre la guerre du Vietnam et à des marches dans les campus universitaires, documentant par la même occasion ces événements avec son appareil de format moyen. Ses images de l’époque sont une merveilleuse capsule temporelle. En suivant le style de vie non conventionnel de ses amis, il a pris note de leur habitudes et est parvenu à immortaliser l’atmosphère de romantisme mâtiné de rébellion caractérisant le mouvement underground de la jeunesse de l’époque, résonnant des échos du jazz.

Ses photographies beats font preuve d’une empathie qui le rendra par la suite apte à photographier le cirque sophistiqué de la fête hollywoodienne – ce qui peut sembler conte-intuitif. Contributeur régulier pour les éditoriaux du New Yorker et de Vanity Fair, c’est cette dernière publication qui a senti que Larry leur apporterait un œil différent s’il était lâché parmi les invités des soirées mondaines. Les clichés que Fink a faits de gens célèbres ne sont pas centrés sur leur identité, simplement sur ce qui se déroule dans le moment. « J’accepte pleinement – du moins j’essaie – l’âme des gens, de tous les gens, quelle que soit leur statut », affirme Fink. Pendant une décennie il est devenu le photographe officiel de Vanity Fair pour les soirées des Oscars. Lorsqu’il sent des liens particuliers entre les gens, il utilise son flash de manière expressive (les peintres du courant de la Nouvelle Objectivité, Otto Dix, George Grosz, font partie de son éducation artistique), soulignant cette connaissance émotionnelle. Il dissèque visuellement les événements, révélant avec théâtralité les dynamiques de groupe. Dans la vision de Fink, les gens, avant d’être des individus, sont des entités faites de corps qui communiquent par la gestuelle, comme dans un tableau Maniériste.

Larry Fink : « Je suis vraiment content que Giorgio Armani ait décidé d’accrocher The Beats et The Vanities ensemble. C’est super qu’il ait vu que ces images ont davantage de points communs qu’il n’y paraît au premier abord. Ce sont deux milieux nés de niveaux d’égocentrisme très différents et opposés, mais qui vivent dans la même vallée. Chacun de ces groupes s’imagine être au sommet de la montagne des contributions. Évidemment les photos ont quarante-cinq ans d’écart. Celles de The Beats ont été prises quand j’étais un jeune romantique, The Vanities quand j’étais devenu, non pas endurci, mais un humaniste ironique. De ce fait, les deux séries ont des esthétiques et des dimensions morales différentes, ce qui apparaît clairement pour les visiteurs ».

« Fink est un grand amateur de jazz, on peut presque analyser ses images en terme de composition musicale : des gens en mouvement, qui nous surprennent, dotés d’une sensualité naturelle et sans calcul. C’est quelque chose qu’un styliste reconnaît aisément », ajoute Giorgio Armani. En effet, ces photographies semblent basées sur la sensibilité musicale de leur auteur, comme il le dit lui-même : « Les gens ont dansé et oscillé pendant trois ou quatre décennies sur cette musique. (…) [La musique] me nourrit profondément. Et j’ai l’ambition de partager avec tous la glorieuse sensation d’assister à un événement sonore ».

Larry Fink est né à Brooklyn et a grandi dans une famille progressiste et engagée politiquement. Il s’est fait les dents en tant que photographe de la beat generation. Comme il habitait à proximité du célèbre club de jazz Village Gate, la bande-son de sa vie a été composée de concerts live de légendes telles que Coltrane, Art Blakey et Charles Mingus. À 76 ans, Larry Fink enseigne depuis plus de cinquante ans, à Yale, Cooper Union et Bard College. L’exposition à Armani/Silos fait suite à bien d’autres, par exemple au MOMA et au Whitney Museum à New York, au Musée de l’Élysée à Lausanne et au Musée de la Photographie à Charleroi. Mais c’est l’exposition à voir en Italie en ce moment.

Paola Sammartano

Paola Sammartano est une journaliste spécialiste des arts et de la photographie basée à Milan en Italie.

 

Larry Fink, The Beats and The Vanities
Du 29 mars à fin juillet 2017
Armani/Silos
Via Bergognone 40
Milan 20144
Italie

https://www.armanisilos.com/en

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