C’est une histoire indienne, l’histoire d’un lieu mythique de Bombay : Merwan, qui après cent ans d’existence, ferme ses portes. Cette boulangerie-café connue et fréquentée par les mumbaikars depuis un siècle pour ses mawa cakes qui sortent des fours tous les jours à 8 heures du matin, était un lieu incontournable de la ville. C’est l’histoire de deux jeunes photographes mumbaikars, Raj Lalwani et Kashish Parpiani, qui décident de saisir l’âme du lieu avant que le rideau ne tombe définitivement.
Fondée en 1914 sur Grand Road par une famille iranienne qui fuyait la famine de son pays, Merwan devient l’un des cafés iraniens les plus célèbres de Bombay. Dans les années 50, il en existe encore plus de 350 dans la ville. Aujourd’hui, on en compte à peine une dizaine. Fréquentés par la diaspora iranienne comme par les mumbaikars, ces cafés, qui sont aussi à l’origine des épiceries et des drogueries, sont des lieux de rencontres et d’échanges incontournables pour les intellectuels indiens.
« Quand nous avons appris que Merwan fermait, nous avons décidé de suivre les derniers jours de ce lieu mythique », déclare Raj Lalwani, photographe. Nous avons créé une page Facebook intitulée Tales from Merwan’s afin de créer une mémoire visuelle des derniers moments de ce lieu si emblématique de Bombay. »
Si les photos sont essentiellement de Raj et Kashish, d’autres photographes mumbaikars, comme Chirodeep Chaudhuri, Ketaki Sheth ou encore Prashant Godbole, ont été invités à participer au projet.
L’histoire de Merwan, c’est celle de Bombay et de sa mutation. La ville change, s’étend toujours plus au nord, se hérisse de tours et de grands ensembles immobiliers et offre de nouveaux lieux commerciaux pour une classe moyenne avide de consommer. Les tables en marbre, les grands miroirs et les chaises de bistrot de Merwan appartiennent à un autre temps, retenu dans les images des deux jeunes photographes, conscients de la transition qui se joue dans leur ville.
Ironie du sort, Merwan avait prévu de fermer le 31 mars, mais comme si la ville voulait retenir le café encore quelques jours, il ne s’est éteint que le 16 avril.