Sylvie Aubenas est à la photographie ce que Mère Teresa est à la misère : une Sainte et une icône. Elle est de la lignée de ces conservateurs méconnus ou oubliés qui l’ont précédé dans le monde muséal de la photographie française : Bernard Marbot, Philippe Néagu, Jean-Claude Lemagny, Françoise Heilbrun…
Sans eux, il n’y aurait pas grand chose dans les collections publiques françaises. La photographie, Sylvie Aubenas, y est venue sur le tard, à 20 ans, au début des années 80. Elle est à l’école nationale des Chartes à l’époque. Elle visite l’exposition Charles Nègre organisée par le musée d’Orsay : c’est le coup de foudre. Auparavant, ses seuls rapports à l’image étaient les cartes postales et les étiquettes qu’elle dévorait aux puces où l’emmenait régulièrement sa mère, scénariste de cinéma. Le virus est pris et ne la quittera pas. Elle se rattrape alors, dévore et éponge toute l’histoire de la photographie. Si elle rate les Texbraun aux puces de Clignancourt, elle sera la groupie de Jean Beauchesne à celles de Vanves. C’est là sa force : l’éclectisme. Celle qui lui fait dire : « Je fais une collection de photos, pas une succession d’achats muséaux. » Récemment, elle a sauvé de la dispersion les images d’Yvette Troispoux, la photographe des photographes pendant 50 ans, et acquis pour la Bibliothèque Nationale les images du plus grand photographe français érotique, Pierre Louÿs.
Eclectisme aussi dans le choix de ses amis, parmi lesquels André Jammes, Michel Frizot, Gérard Lévy, Serge Plantureux, François-Marie Banier. C’est de cet éclectisme qu’est né l’idée de cette chaîne de la photographie qui commence aujourd’hui. Un Who’s Who convivial où chacun choisit quelqu’un qu’il admire profondément et écrit sur lui. Cette chaine se poursuivra chaque semaine. Nous en sommes à 10 aujourd’hui. Le dernier nominé habite Le Maine. Vous serez surpris.
Jean-Jacques Naudet
Sylvie Aubenas, conservateur général, directeur du département des Estampes et de la Photographie de la Bibliothèque nationale de France