Durant mon enfance en Virginie, les sorties éducatives se passaient dans les usines de cigarettes et sur les champs de bataille de la guerre de Sécession, avec un sac-déjeuner en remorque. Jeune fille, je me retrouvais souvent avec une tasse sudiste remplie de poudre Kool-Aid diluée dans quelques mesures d’eau, pour former une pâte sucrée que je mangeais avec les doigts. Je me baladais sur mon bicyclette Schwinn dans les environs, et je frappais à la porte d’inconnus avec mes doigts encore tout collants. Je peux me rappeler d’une de ces maisons, où je tapais pour demander si je pourrais sauter sur le trampoline qu’il y avait dans le jardin. C’était celui des filles Gibson, les descendantes de Charles Dana Gibson, le fameux illustrateur. Il dessina la femme idéale du début du vingtième siècle, la Gibson Girl. Je hantais bientôt leur pelouse en permanence.
La vigne kudzu grimpe maintenant sur la façade de la maison de mon enfance, couvrant le passé comme un voile, et lui offrant le repos, alors que je recherche l’intimité d’un « chez moi » dans d’autres lieux. Suivant la route du sud au rythme lent d’une marche funèbre, cette série me ramène aux jardins et aux chemins de ma jeunesse. Elle parle de l’hospitalité des étrangers, et insiste sur un sentiment que j’ai parfois en réalisant des portraits. Le sentiment que j’étais supposée rencontrer cette personne en particulier, ou tourner précisément dans cette rue. Le titre de la série vient du vieux dicton « American By Birth, Southern By The Grace of God » (Américain par la naissance, Sudiste par la grâce de Dieu). Les images sont faites des lieux, et des personnages que je crois avoir trouvé par le biais d’une sorte d’intervention divine. Ce sont des étrangers, qui m’invitent chez eux, pour m’assoir un moment et entendre leurs histoires. Des personnages qui sont réels, et non imaginés par les grands auteurs que le sud a pu produire.
Susan Worsham, 2011 FotoVisura Grant Finalist
