C’est en 2013 que la photographe et musicienne franco-portugaise Sue-Elie Andrade-Dé a l’idée de créer The Smell of Dust. Après avoir vécu plusieurs mois à São Paulo, elle constate que les Brésiliens sont beaucoup plus enclins à sortir et se réunir autour d’événements musicaux que pour aller voir une exposition ou fréquenter un musée. Elle se met alors à imaginer une manière de montrer la photographie qui serait plus proche de ce mode de vie. « Il s’agissait de contourner et de détourner la photographie de son support, de l’amener là où on ne l’attend pas et vers ceux qui ne la cherchent pas ».
Plusieurs mois de réflexion et de travail plus tard, début 2014, a lieu la première édition de The Smell of Dust. Dans la première version du projet, 25 artistes d’une quinzaine de nationalités différentes voient leurs images engagées dans une expérience sonore et visuelle, projetées en toile de fond d’un concert dont elles forment la partition. En invitant le public à venir voir un concert, mais en y intégrant la présence de la photographie, la créatrice du projet souhaite surprendre, et « recréer ce qui pouvait se produire autrefois autour des albums photo; alors que l’on se réunissait de manière spontanée avec des amis ou de la famille et que la photographie s’immisçait dans ce moment social ».
C’est l’atmosphère de chacune des séries photographiques sélectionnées par la créatrice du projet qui inspire la composition des musiques jouées en live pendant la projection,. Puis, c’est cette bande-son qui, à son tour, viendra façonner le rythme, le montage, les collages et les effets de transition entre les images projetées. Sue-Elie Andrade-Dé souhaite ainsi, à travers le dialogue continu entre les différents supports, « proposer une forme de création qui s’auto-alimente, dans laquelle l’origine et le point de départ sont brouillés, tout comme les références ou encore la notion d’auteur». Ces idées de mélange, de collage et de perte d’origine, la musicienne les relie à la musique concrète. Alors que la photographie contemporaine confère habituellement un statut majeur à l’auteur et à l’artiste, le va-et-vient continu qui modèle The Smell of Dust — alors que l’on ne sait plus si le son a inspiré les images ou si c’est le contraire — propose une experience artistique hybride, nouvelle et impertinente.
The Smell of Dust en est aujourd’hui à sa 5ème édition, et continue à voyager à travers les pays, événements et festivals autour du monde. En réinterprétant des travaux de photographes par le collage et le montage pour former d’autres récits, mais aussi en choisissant de travailler avec des musiciens toujours différents — allant du DJ au guitariste, et en prenant soin de collaborer avec des artistes locaux selon les lieux de présentation du projet —, Sue-Elie Andrade-Dé a imaginé une manière nouvelle de montrer la photographie, constamment mouvante, s’adaptant aux contours des lieux qu’elle traverse, et prenant ainsi le contrepied de l’aspect figé que l’on confère souvent au médium photographique.
http://www.thesmellofdust.com/
