Pantelleria
Lorsqu’on arrive à Pantelleria, on est presque désorienté : la solitude, les bâtiments en ruine, les routes imperméables, inégales et au tracé incertain ; tout à Pantelleria suscite d’abord une étrange inquiétude.
Il y a des espaces où l’on a peur de marcher parce qu’il n’y a rien autour, pas même un signal téléphonique, des endroits où l’on ne comprend pas si, après la montée, le chemin va continuer à descendre ou si l’on va rencontrer un précipice surplombant la mer.
Petit à petit, cependant, nous commençons à tomber amoureux de ces espaces, parce qu’ils sont capables de nous parler de nous-mêmes, de ce que nous avons été, comme si l’île, au cours de ses 5 000 ans de vie, nous avait déjà vus fouler cette terre, admirer l’immensité de la mer à perte de vue, chasser nos pensées dans le vent.
Ce sont des espaces silencieux, où vous pouvez être seul avec vos pensées.
Le silence à Pantelleria est la chose la plus redoutable mais aussi la plus ancestrale qui puisse encore exister ; c’est une lourde torpeur, une lourde couverture qui s’abat sur tout, surtout la nuit, et rend le monde extérieur surréaliste.
Ainsi, ces espaces à la limite du silence racontent une vie qui a existé et qui s’y déroule encore lentement ; le simple fait de les contempler nous apaise et ralentit notre rythme, et c’est là que la magie opère : au milieu des bâtiments en ruine, des chaînes rouillées, de la poussière et de la terre, nous retrouvons cette voix intérieure que nous n’entendons plus dans le chaos de nos villes, une voix qui nous dit qu’il fut un temps où nous étions chez nous sur cette île.
Stefano Gili