A Visa, venus d’horizons si différents nous nous retrouvons pour parler le seul langage universel : l’image. Fidèle à ses origines, Paris Match n’est pas un journal qui dit « C’est merveilleux la vie ». Nous continuons à montrer la vie telle qu’elle est. Inlassablement sur le terrain, nos reporters et photographes recherchent une vérité sans fard ni concession. Cet engagement de tous les instants nous conduit à publier aussi bien les moments forts que les clichés emblématiques qui s’inscriront dans la mémoire du temps qui passe. L’époque a érigé le commentaire en religion. Elle nous enseigne qu’il faut avoir à tout moment un avis sur tout et le partager avec la planète en temps réel. « Twitter » 140 caractères depuis une salle d’audience de Manhattan relèverait de l’exploit journalistique ! Dans cette vertigineuse accélération de l’info où l’on parle beaucoup, on en oublierait presque ceux qui vont sur le terrain et rapportent leur propre information. Cette vérité du terrain et des faits est pourtant la base de la chaîne médiatique qui va de l’événement jusqu’au consommateur. Le photographe reste le premier maillon indispensable. Car il est nos yeux sur le terrain et il a son propre regard. C’est son regard qui éclaire le notre et permet l’immersion. A Visa, nous voulons défendre le photojournalisme. Avec cette passion indispensable au métier où les dangers se cachent souvent derrière les événements. Car comme l’explique David Carr du New York Times « Personne n’a encore inventé le drone journalistique ». « Le missiles peuvent être téléguidés à distances et les engins volant espions commandés par joystick, mais les journalistes continuent d’aller voir par eux-mêmes où les bombes atterrissent ». Aucune machine ne peut accomplir cela et saisir l’humanité d’un instant. Mettre un nom, une histoire sur des visages. Comme dans le cas de Yuko Sugimoto. La photo de cette jeune femme de 28 ans alors qu’elle recherchait désespérément son fils Raito dans les décombres est devenue l’icône de la tragédie. Elle a été publiée sur 55 couvertures de magazines du monde entier dont Paris Match. Pourtant il a fallu une longue enquête journalistique d’un photoreporter pour retrouver l’identité et la véritable histoire de Yuko, héroine involontaire et anonyme du tsunami. L’information mondialisée s’est donnée des ailes sur Facebook et Twitter et la vidéo sur les smartphones. Elle défie les dictateurs et les censeurs. La technologie est là pour nous aider à ajouter des dimensions à nos récits. Pourtant plus les télés et YouTube bombardent nos sens de leurs flux vidéo, plus notre cerveau éprouve le besoin de s’arrêter sur des images fixes. Du mouvement, la photo fait l’éternité. De l’événement, elle fait l’histoire. L’émotion est finalement le seul état où l’être humain ne ment pas. Ce sont ces instant d’éternité et de vérité que l’on ressent dans les expos de Visa.
Olivier Royant, Directeur de la rédaction de Paris Match