Il s’appelle Jean-Paul Alduy. Il est sénateur des Pyrénées-Orientales. Beau personnage, passionné et avec un franc parler peu courant. C’est grâce à lui que Visa bénéficie d’une totale assistance locale. Le Festival, il l’a découvert en 1991. Deux ans plus tard, lors d’une élection inattendue, il devient maire. Il ne cessera dès lors de soutenir Visa. Il a du mérite d’ailleurs, la gauche et notamment le parti socialiste dirige la région. Georges Frêche et ses acolytes n’ont de cesse d’alourdir le cahier des charges, de changer les appels d’offres, de modifier les règles de sous-traitance, de supprimer les subventions, rien ne lui sera épargné.
« Je me souviens de quelques déjeuners et dîners angoissés avec Roger Thérond et Jean-François Leroy à la villa Duflot où l’on ne savait jamais ce qui nous attendait le lendemain. Il sera même question un jour que Visa parte ailleurs. C’est le comble de l’ironie que le parti censé représenter la liberté, l’égalité, la fraternité, le parti de la déclaration des droits de l’Homme ait tout fait pour étouffer ce haut lieu de liberté et de photojournalisme. Oublions, je ne veux me souvenir que des moments heureux, la même joie chaque année de retrouver le sourire de tous ces photographes. Quelques extraordinaires rencontres de vétérans oubliés, la légion d’honneur remise à Göksin Sipahioglu, le direct de Laurent Van der Stockt durant l’attaque d’une mosquée chiites en Irak. Il en sortira indemne, mais 3 ans plus tard se fera tabasser par un videur de boîte de nuit à Perpignan. Je me souviens aussi de la projection au grand Rex (à Paris) pour le XXe anniversaire de Visa.
Visa n’est pas le Festival de l’actualité heureuse. Il est l’aiguillon annuel qui nous rappelle les morts, la souffrance, le désespoir. Tout ce que l’on a zappé, oublié, peu publié, voir même jamais montré.
Le photojournalisme est en crise, certes. Mais il doit survivre. Visa est un festival à part parce que comme le disait Roland Barthes, « c’est la photographie qui est la mémoire collective du monde ». Le photojournalisme fabrique l’archéologie de notre avenir, il faut qu’il trouve son modèle économique. Visa ne sera que ce que deviendra le photojournalisme. »
Jean-Jacques Naudet