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Spécial livres : Bailey’s East End, de David Bailey

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Cet ouvrage en trois volumes signé de l’Anglais David Bailey, célébré lors de la dernière édition des Rencontres photographiques d’Arles, est probablement l’un des livres de l’année. East End, publié cet été par Steidl, rassemble 620 images réalisées par le photographe dans ce quartier populaire de la capitale britannique.

Un quartier qui l’a vu grandir et dans lequel il a posé son regard au cours de trois décennies, des années 60 à 2000, en passant par les atypiques années 80. Cette proximité est affichée dès les premières pages du premier volume — dédicacé à Catherine Bailey, la mère de David —, qui renferme dans des scènes intimes, de rue, de fête, et d’innombrables portraits de proches ou de parfaits inconnus les années de jeunesse du photographe. En couleur, mais surtout en noir et blanc, on est invité à s’immiscer dans le quotidien de ce monde d’ouvriers et de dockers, entre échoppes, marchés de fringues, rings de boxe, pubs, gueules d’anges ou de vieux briscards, classe anglaise et avènement du rock&roll. Ce temps, David Bailey l’illustre en ces mots : « Les cockneys auraient dû écouter, mais ils ne l’ont pas fait. Ils sont partis vers l’Est comme leurs ancêtres avant eux. D’Old Nichol à Whitechapel, puis à Stepney et Bow, enfin à ce qui est aujourd’hui appelé Newham et plus tard à Barking, Dagenham et en Essex. Ma mère était de Bow, mon père serait de Hackney, mon grand-père de Bethnal Green. Avant lui, ils étaient tous de Whitechapel, du moins aussi loin que l’on peu remonter dans les registres. »

Plus tard, alors que David Bailey s’est mué en talentueux photographe de mode, il amène les belles filles sur les bords de la Tamise, entre les entrepôts et les navires commerciaux, et les fait poser sur les embarcations, sur les quais ou contre la brique rouge des bâtiments. Une pratique qui évoque évidemment celle de son contemporain William Klein, qui lui promena ses modèles sur le bitume brut des rues de New York. Singulier contraste qu’il a choisit de renforcer dans le livre en juxtaposant les portraits de ces belles dames à des vues sombres et architecturales du port. Ces dernières, révélant habitations délabrées, grillages et entreprises à la dérive apparaissent en nombre et figent l’activité d’époque de ce quartier pauvre.

Dans le troisième volume, on retrouve une atmosphère dramatique, où l’accent est mis, à travers les photographies, sur la présence de la religion, celle de la nécessité ou même de la détresse, pour un East End devenue terre d’accueil de populations immigrées d’Asie ou d’Afrique. Ainsi, outre les hommes et leurs émotions, ce sont les objets et leurs symboles qui ont attirés l’œil de David Bailey : panneaux de propagande ou de publicité, inscriptions contestataires, tags, livres saints, intérieurs d’églises, vitraux, statues, antiquités, drapeaux, pneus ou objets à l’abandon dans des terrains vagues. Une multitude d’observations, qui mêlées à celles des faits et gestes de ses habitants informent inévitablement sur la décadence d’un quartier jadis défavorisé mais indispensable au développement industriel de Londres. « C’était mes trois périodes clés pour en tirer des photographies au lieu de se contenter de parcourir cinquante ans d’archives. A la fin des années 194O et au début des années 1950, j’ai entendu cette citation à la radio : “Met le cap sur l’Est, jeune homme.” A ce moment-là, je n’y ai pas trop pensé. Plus tard, j’ai supposé que cela venait d’Amérique et que cela remontait au milieu du XIXe siècle, lorsque la côte Ouest s’ouvrait aux richesses et aux opportunités. »

LIVRE
East End

Photographies de David Bailey
Publié chez Steidl
464 pages / 620 photographies
ISBN 978-3-86930-534-9
98 €

www. steidl.de
www.davidbaileyphotography.com

 

 

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