J’avais communiqué aux Rencontres d’Arles un diaporama réalisé à partir de mes images par le centre Pompidou et déjà projeté à Beaubourg.
Devenu depuis peu rédacteur en chef de Sygma, ce diaporama était une rétrospective de mes 20 années de reportage. Un gros travail, sonorisé avait été fait.
Très honoré que les Rencontres me proposent de le projeter, j’ai accepté.
Ce serait donc ce soir. Le 8 juillet 1982 à 22h30 au Théâtre Antique, un lieu ou l’Histoire prenait tout son sens.
La journée avait bien commencé par un très agréable déjeuner au Van Gogh ou j’avais eu le plaisir de rencontrer Agnès Varda et bavarder longuement avec elle.
Très fier de l’honneur que l’on me faisait et accompagné de quelques proches j’étais un des tout premiers à m’asseoir sur les tribunes de pierre.
Une belle soirée d’été, il faisait encore chaud, un temps magnifique. Le jour tombait et l’heure de la projection approchait.
Personne dans les tribunes, un désert, une vingtaine de passionnés sans doute. Je sentais le bide s’installer. Et puis des cris, des hurlements sortaient des maisons alentours, des Ah, des Ohs désespérés. De grands silences puis de nouveau des cris.
C’était la demi-finale du Championnat du Monde de Football à Séville.
Du Théâtre, sans les images nous avions le son et pouvions suivre les événements. À la fin du match, vers 23 heures le Théâtre était toujours vide et les deux équipes étaient ex-aequo.
Pas de chance pour moi et ma projection, prolongation des hostilités. Toujours zéro zéro.
Il commence là à être très tard et j’envisagea avec mes amis de quitter les lieux discrètement pensant que l’évènement le plus important de la soirée (ma projection) était annulé.
A Séville l’arbitre décide une séance de Tirs au But. La France mène 3 à 1. La température monte, à Arles, les hurlements d’encouragements montent de toits en toits
Je n’ai jamais détesté autant le football.
Puis, patatras Schumacher, le goal allemand bloque le dernier tir de Platini.
Victoire de l’Allemagne.
Bureau zéro !
Archives de l’Œil de la Photographie – Henri Bureau, 2011
