Le mythique marché à viande de Smithfield, à Londres, va fermer ses portes en 2028, a annoncé la City of London Corporation. Ouvert en nocturne depuis plus de 800 ans, Smithfield Market fournit principalement les grossistes et les restaurateurs anglais. Situé au cœur de Londres, entre le quartier de la City et la cathédrale Saint-Paul, il est l’un des derniers bastions industriels de la ville encore en activité.
Des milliers de personnes en blouse blanche y travaillent chaque nuit, de deux heures du matin à huit heures, pour décharger, installer et vendre la viande. Le photographe britannique Orlando Gili a réalisé une série de portraits des bouchers de Smithfield. Ils représentent la dernière génération de bouchers. La fermeture prochaine de Smithfield va laisser un grand vide : ouvert chaque nuit en semaine, il avait vu le jour sous le règne du roi Henry VIII.
La fermeture de Smithfield : un ultime signe de la désindustrialisation de Londres
À travers cette série de portraits, Orlando Gili souhaite donner un visage à ces métiers de la viande. Les visages de ces travailleurs portent les marques des longues heures de labeur nocturne. Photographiées en début ou en fin de service, les photographies de Gili montrent un visage de l’Angleterre ouvrière : celui des entrepôts, des manutentionnaires et de l’agroalimentaire.
Certains ont choisi ce métier par passion, d’autres par héritage familial. Si une aide à l’installation est proposée aux bouchers qui vont devoir quitter Smithfield, ils sont nombreux à avoir dépassé l’âge de la soixantaine et à partir à la retraite. Avec eux disparaît toute une histoire de la vie de ce quartier londonien et un savoir-faire. M. Burt, qui a travaillé pendant 22 ans à Smithfield, s’étonne que le marché n’ait pas fermé plus tôt : Covent Garden, un ancien marché de fruits et légumes londonien, avait fermé dans les années 1970 et pour être relocalisé à Nine Elms, en banlieue.
Depuis plusieurs décennies, l’industrie a quitté les centres des métropoles pour s’installer dans les banlieues et les zones industrielles. Cet éloignement géographique conduit à une invisibilisation des travailleurs, d’où l’importance du travail de Gili. Situé en plein cœur de Londres, Smithfield Market devrait accueillir prochainement les locaux du musée de la ville de Londres.
Photographier les travailleurs et les travailleuses dans les usines
Photographier le travail est un acte politique. Aujourd’hui, rentrer dans des usines pour photographier les travailleurs s’apparente à un parcours de combattant. Pourtant, il est nécessaire de documenter les conditions de travail des ouvriers.
Orlando Gili immortalise la dernière génération de bouchers de Smithfield. La consommation de viande n’a de cesse de diminuer ces dernières années et les métiers de la viande se transforment : création d’abattoirs plus petits, commerce de la viande plus éthique, etc. Cette série de photographie « Smithfield Night Market », immortalise l’éphémère et met en lumière les travailleurs de l’ombre.
Laurine Varnier
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