La schizophrénie harmonieuse de l’Inde
Le Seattle Art Museum propose City Dwellers : Contemporary Art from India, une exposition qui interroge, à travers la collection de Sanjay Parthasarathy et Malini Balakrishnan, l’Inde contemporaine des villes.
En 2011, pour la première fois depuis l’indépendance de l’Inde, la croissance démographique urbaine a dépassé celle des zones rurales. La population urbaine a augmenté de 40% ces dix dernières années et plus de 2 700 villes de plus de 5 000 habitants ont vu le jour sur la même période (source : Le Monde : Inde, le réveil, 2014). Les villes indiennes perdent leur homogénéité en grandissant, et les disparités sociales et économiques ne cessent de s’accroitre. Ce mouvement sans précédent ne laisse pas indifférent les artistes indiens, qui s’intéressent à leurs habitants et au rapport que ces deniers entretiennent avec leur environnement.
Que nous dit l’exposition sur la ville indienne et plus largement sur l’Inde contemporaine ? Qu’elle est un chaos organisé et multiculturel, qui mélange le passé au présent, une religion millénaire, l’hindouisme à la mondialisation. Ainsi Vivek Valisini dans Include Me Out II examine les structures sociales de l’Inde contemporaine et la confrontation entre tradition et influences occidentales en remplaçant les bas-reliefs de l’entrée d’un temple par des hommes et des femmes de la rue, des touristes, ou encore lui-même et sa mère.
Superposition des deux cultures également chez Manjunath Kamath, qui mêlent des icônes indiennes et européennes, mais traitées comme un triptyque Renaissance, alors que Nandini Valli Muthiah met en scène Krishna, le dieu à la peau bleue, perdu dans sa chambre d’hôtel de luxe, symbole d’un monde qui semble lui échapper.
L’Inde change. On le voit aussi dans les photos de Dayanita Singh avec sa série Ladies of Calcutta, qui met en scène trois générations de femmes indiennes dont la plus jeune a troqué le sari traditionnel pour une robe longue.
Ce que nous montre City Dwellers, c’est que la culture indienne aime le contraste, l’alliance des contraires : le passé et le présent, le local et le global, l’est et l’ouest. Elle jongle avec l’espace et le temps dans une “schizophrénie harmonieuse”, comme le mentionne l’écrivain Pavan Sharma.
Cette exposition est aussi l’occasion de présenter une partie de la collection de Sanjay Parthasarathy, ancien cadre dirigeant de Microsoft, qui a créé la société informatique Indix basée à Seattle et Chennai. Un collectionneur indien de son temps, lui-même carrefour de cultures.
EXPOSITION
City Dwellers: Contemporary Art from India
Jusqu’au 15 février 2015
Seattle Art Museum
1300 First Avenue
Seattle, WA 98101
USA