Diplômé de l’Université du Pays de Galles en photographie documentaire, Sam Ivin est né en 1992 à Londres. Sa série Lingering Ghosts (fantômes persistants) aborde la notion de perte d’identité des migrants qui transitent dans des centres d’accueil en Angleterre avant d’obtenir des papiers, sésames nécessaires pour travailler et voyager.
Pourquoi êtes-vous devenu photographe ?
Je me souviens que, enfant, j’aimais prendre des photos… mais c’est quand on m’a offert un appareil à 16 ans que j’ai commencé à m’intéresser sérieusement à la photographie. Les images m’ont toujours passionné, donc cela s’est fait de manière naturelle. J’ai suivi une année de cours dans une fondation d’art pour être sûr de mon choix avant d’aller à l’université. J’ai ensuite étudié la photographie documentaire à l’université de Newport au Pays de Galles jusqu’en 2014.
Comment avez-vous connu le festival Circulations ?
C’est le festival qui est venu me chercher… J’ai reçu un mail qui me proposait de postuler avec ma série Lingering Ghosts. Je n’avais jamais entendu parlé du festival mais le principe me paraît intéressant.
Qu’en attendez-vous ?
Le fait que les expositions se déroulent au Centquatre est un atout car c’est un lieu qui a déjà accueilli de belles expositions photo. Par ailleurs, j’ai hâte de rencontrer les autres photographes et de découvrir leurs images.
Vivez-vous de la photographie ? Avez-vous une autre activité à côté ?
Bonne question et très importante… Avec mon travail documentaire et mon livre sur la série Lingering Ghosts, j’ai gagné un peu d’argent mais pas suffisamment pour en vivre… L’année dernière, pour gagner ma vie, j’ai photographié des événements comme le “Segway experience days” et j’ai fait des workshops… Ce n’est pas facile mais c’est possible.
Décrivez le propos de votre série et expliquez pourquoi vous avez décidé de la faire ?
Depuis que j’ai eu mon diplôme, j’ai publié Lingering Ghosts avec Fabrica en Italie. Cette série explore la manière dont les demandeurs d’asile vivent les longues périodes d’attente avant d’obtenir leur statut de réfugiés au Royaume-Uni. Ces portraits en grand format dont j’ai gratté les tirages ont pour objectif de nous questionner sur la manière dont les services de migration traitent ceux qui, au final, ne recherchent qu’un lieu sûr pour vivre. Intervenir sur les tirages est une manière de souligner la frustration et le désarroi que les mois, parfois même les années, d’attente peuvent avoir sur les individus.
En quoi consiste l’étape préparatoire de cette série ?
J’ai d’abord fait des recherches sur Internet, puis j’ai visité un camp de réfugié situé près de l’aéroport d’Heathrow, à Londres. Ensuite, je suis allé dans d’autres centres, notamment le centre Trinity situé à Cardiff. Ce sont des lieux de rencontres importants pour les réfugiés et les demandeurs d’asile. Ils y trouvent une vie sociale, des conseils, etc. J’ai passé deux mois là-bas comme volontaire pour rencontrer les gens. Plus je les connaissais plus je réalisais à quel point ces réfugiés étaient affectés par cette longue période d’attente au cours de laquelle ils ne peuvent ni travailler ni voyager… Ils n’ont rien à faire et aucune idée de quoi sera fait leur futur… Cela m’a mis en colère. J’ai voulu explorer ce sujet pour susciter une prise de conscience.
Quels sont vos maîtres ou vos références dans la photographie ou dans l’histoire de l’art ?
Je pense que tout photographe documentaire a été inspiré, ou du moins influencé, par Don McCullin. James Natchway a été le premier photographe qui m’a marqué. Tim Hetherington et son livre Infidel pour lequel il a suivi des soldats américains en Afghanistan m’ont également beaucoup influencé. Actuellement, je lis A History of Pictures de David Hockney et Martin Gayford. C’est un livre vraiment fascinant sur la manière dont les images évoluent et influencent les artistes…
En quoi la photographie a-t-elle changé votre point de vue sur le monde ?
Je pense que l’omniprésence de la photographie dans les réseaux sociaux et dans la publicité affecte la manière dont nous regardons le monde. Je ne suis pas certain que les photographies que je fais changent la manière dont je perçois le monde mais cela m’aide à rester concentré sur mes pensées et m’oblige à gérer mes priorités.
Propos recueillis par Sophie Bernard
Festival Circulation(s) – Jeune Photographie Européenne
Du 21 janvier au 5 mars 2017
CENTQUATRE
5 rue Curial
75019 Paris
France
Catalogue
Editions 2017,
Publié par le bec en l’air,
22 euros
Livre
Sam Ivin, Lingering Ghosts
Asylum seekers in the UK
Publié par Fabrica, 19,5 livres
http://www.fabrica.it
www.galerie-circulations.com