Le musée Nicéphore Niépce se joint à la célébration de la culture lituanienne. L’exposition « Benoît Henri Tyszkiewicz, Entre la Lituanie et la France » met en lumière le travail méconnu du Comte Tyszkiewicz, pionnier de la photographie lituanienne, dont la redécouverte en 1993 est largement due au musée de Chalon-sur-Saône.
L’Œil de la Photographie s’est entretenu avec deux des trois commissaires de cette exposition, Audrey Lebeault du musée Niépce et l’historien de la photographie lituanienne du 19e siècle, Dainius Junevičius.
Who was Count Tyszkiewicz?
Dainius Junevičius : The Count was born in December 1852 in Lithuania and moved to Paris as a young man. Photography was an important part of his life very early on. Taking pictures for his own enjoyment, he joined the Société française de photographie in 1884. He became acquainted with the French Pictorialists Robert Demachy and Constant Puyo and gradually began to see photography as an art. In 1897, he joined of the Pictorialist Paris Photo Club and was active in exhibitions. Around 1905, the Count’s interest in photography disappeared for unknown reasons, and he did not participate in exhibitions after 1906. He was thus active in photography for about 20 years. After 1915 he did not return to Lithuania, but lived in France and Poland, where his daughter also lived. He died in 1935 and was buried in Nice.
Count Tyszkiewicz is said to have produced a body of over 20,000 prints and negatives. Long thought to have disappeared after World War I, some images resurfaced in the 1990s. How was his work rediscovered?
D.J. : All his negatives and prints were believed to have been burnt in 1915 in a fire at the Villa St. Nazaire, where the photographer lived during the First World War. However, the photographer was resurrected from oblivion by the appearance of the first major bundle of his photographs in 1993. The Nicéphore Niépce Museum acquired 86 photographs in 1993 and organised an exhibition in 1994. It was then that the first wave of interest in the photographer began. Exhibitions were held in Vilnius, Kaunas and an album was published in Lithuania. It was then established that Tyszkiewicz was the author of the 76 photographs of an unidentified photographer deposited in Warsaw. The second sensation was caused by the Lithuanian collector Gediminas Petraitis, who, under undisclosed circumstances, found and brought back to Lithuania almost 700 photographs a few years ago. Since then, new photographs have continued to appear at auctions, suggesting that the source has not yet been exhausted. The latest sensation came earlier this year, when another Lithuanian collector, Dominykas Šaudys, bought 9 of Tyszkiewicz’s photo albums at a Paris auction. Interestingly, we used to know only the individual pages, but now we know what the albums looked like and we will be able to show two of them to the public in this exhibition.
Audrey Lebeault, could you tell us more about the part played by the musée Nicéphore Niépce in the rediscovery ?
Audrey Lebeault : Le musée Nicéphore Niépce est très fier d’avoir contribué à la redécouverte de ce talentueux photographe. En 1993, la société des Amis du musée Nicéphore Niépce a acheté à M. Georges Aboucaya, antiquaire à Saint-Ouen un lot de 86 photographies collées sur 46 planches cartonnées, qui faisaient partie d’un album relié. La plupart des planches portent des inscriptions manuscrites à l’encre rouge et noire, probablement de la main de Tyszkiewicz, avec les dates, les légendes des lieux visités, des personnes photographiées, des anecdotes. Cet ensemble a été exposé en 1994 au musée Nicéphore Niépce et dès lors, des chercheurs et collectionneurs s’y sont intéressés et ses photographies que l’on pensait toutes détruites ont commencé à refaire surface.
More than seven hundred images were found and returned to Lithuania. Where is this collection held today?
D.J. : Most of Gediminas Petraitis’s collection is held by his heirs, but some of his photographs have been acquired by the most important museums in Lithuania, amongst them the Šiauliai « Aušros » Museum, the Lithuanian National Museum of Art, the Kaunas District Museum, which preserves the memory of Tyszkiewicz and was one of the initiators of the photography exhibition.
The exhibition was built from various collections from the Kauno rajono muziejus (Kaunas), the Fotografijos muziejus du Šiauliai « Aušra » muziejus (Šiauliai), the Lietuvos nacionalinis dailės muziejus (Vilnius), the Kretingos muziejus (Kretinga) et the private collections of Gražina Petraitienė (Vilnius) and Dominykas Šiaudys (Kaunas). How did you proceed for the selection ?
A.L. : Ma collègue Emmanuelle Vieillard et moi nous sommes rendues en Lituanie pour visiter les différents lieux de conservation des photographies de Tyszkiewicz et faire un choix parmi les centaines de planches conservées, la partie la plus déchirante de ce projet d’exposition. Voyons le bon côté de cette sélection, les collections lituaniennes ont encore un immense potentiel pour de futures expositions ! Nous suggérons à nos collègues de Nice de s’intéresser à ce fonds, les collections lituaniennes comportent un très grand nombre de photographies prise dans cette ville qu’il affectionnait et dans laquelle il a d’ailleurs été enterré.
The exhibition presents a selection from his reconstituted collection to the public for the first time since the 1994 Chalon-sur-Saône exhibition. What are the main axes of this show ?
A.L : Nous avons choisi de montrer le travail de Tyszkiewicz dans deux des pays où il a passé la majeure partie de sa vie, la Lituanie et la France. Nous avons organisé la scénographie comme un aller-retour entre ces deux mondes dans lesquels il évoluait, lui qui était un grand voyageur. Nous allons présenter sa vie et sa famille qu’il aimait à photographier, ses voyages et ses lieux de résidence en Europe, et plus particulièrement en France et en Lituanie, ou encore son rôle dans le mouvement pictorialiste français à Paris.
Can you tell us about one photograph of your choice from the exhibition?
D.J. : Among the photographs taken in Wiala is one of the Tyszkiewicz family and some friends sitting on oak branches. This photograph is on the cover of Gediminas Petraitis’ collection album „Retour“. It shows Tyszkiewicz’s attitude to life, how to have fun, enjoy life, and have fun. Think how many ladders and helpers it took to create such a picture. Maybe someone can overcome their fear of heights.
AL : J’ai un faible pour ses photographies d’Isabelle Féraud, son amie et compagne après le décès de son épouse, que l’on retrouve dans grand nombre de clichés. Il la photographie sous plusieurs aspects, dans des attitudes très posées et douces, quelques fois plutôt prises sur le vif, dans son intimité, avec ses amis, et d’autres encore déguisée dans des poses cocasses. Avec cet immense corpus, on a l’impression de toucher du doigt la personnalité de ses modèles. J’aime aussi beaucoup l’intérêt et le regard curieux mais néanmoins respectueux qu’il porte sur les “petites gens” qu’il rencontre, lui le grand aristocrate. On sent un réel intérêt pour leur vie, très différente de la sienne. Il est à noter, qu’en plus du russe, du polonais et du français qu’il parlait couramment, il avait également des notions de lituanien, ce qui était rare car à cette époque pour une personne de son rang social, car c’était une langue parlée uniquement par les gens du peuple.
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